Les femmes sont la cible principale de l’islam radical

Quel lien existe-t-il entre des mouvements islamistes aussi dispersés que le Hamas, Al-Qaida, le Hezbollah, Boko Haram, les talibans, l’Etat islamique ? Tous se réclament du Coran mais en proposent des interprétations variées. Tous s’inscrivent dans des cultures dissemblables. Mais un trait au moins les réunit, qui relève moins de la religion ou de l’idéologie que de ce que l’on pourrait qualifier de psychanalyse de groupe : la haine des femmes.

N’est-il pas étrange que la priorité de ces islamistes, partout où ils emportent des batailles ou s’emparent du pouvoir, est d’asservir les femmes ? A Téhéran, les ayatollahs n’ont de cesse qu’aucun cheveu ne dépasse du tchador, à Kaboul que la burqa rende les Afghanes uniformes, quand on ne les viole pas ou qu’on ne les réduit pas en esclavage, ce qui est leur sort présent au Nigeria et en Irak.

MAHOMET NE TRAITA PAS LES FEMMES PAR LA VIOLENCE

Ce n’est pas dans le Coran que l’on trouvera les sources de cette haine des femmes et de la hantise de leur corps : le prophète Mahomet ne traita les femmes ni par la violence ni par le mépris, et son épouse Khadija, à ses côtés, prit part à ses conquêtes et à sa révélation.

Certes, il est vrai que les femmes jusqu’aux temps modernes en Occident ont toujours été minorées mais pas exterminées comme elles le sont en ce moment même, au nom d’Allah, au Nigeria et en Irak sur le mont Sinjar. Pour comprendre, plutôt que de lire ou relire le Coran, l’ouvrage contemporain de Sayyid Qutb (1906-1966), La Justice sociale en islam, publié en 1949, me paraît une source plus éclairante du djihadisme que toute prétendue référence des islamistes aux temps du Prophète.

RÉVOLTE CONTRE L’OCCIDENT

Qutb, instituteur égyptien invité aux Etats-Unis pour y compléter sa formation en 1947, subit à New York un choc affectif dont on ignore la nature, mais qui le transforma en l’idéologue fondateur de l’islamisme moderne. C’est à New York qu’il rencontra le diable, qui se manifesta sous la forme d’Américaines, aux bras nus et aux jambes nues. Cette exhibition relative bouleversa Qutb, qui métamorphosa ce que l’on devine être sa frustration en une pieuse révolte contre l’Occident et ses créatures, puis en un appel à la guerre sainte contre l’Occident tentateur.

L’exaltation de Qutb serait sans doute restée sans conséquence dans son pays, l’Egypte, qui était en voie d’occidentalisation rapide, si le dictateur de l’époque n’eut la mauvaise idée de l’incarcérer avec d’autres dirigeants de sa confrérie des Frères musulmans, et de les faire pendre. Le président Gamal Abdel Nasser (1918-1970) fit basculer ces islamistes dans la violence et l’œuvre de Qutb devint une sorte de seconde révélation, une nouvelle lecture du Coran à usage des djihadistes contemporains. Sa détestation du corps féminin, obsession personnelle d’un jeune homme instable, devint un programme politique.

ARRIÉRATION

Que la femme, son corps et son statut se retrouvent au cœur du combat entre djihadistes et modernité dépasse le seul destin de Qutb. L’histoire de la modernité coïncide avec celle de la libération des femmes. Partout où les peuples sont miséreux, partout où règnent le despotisme et l’ignorance, les femmes en sont plus victimes que les hommes. Partout où l’éducation, l’économie et la démocratie progressent, les femmes en sont les premières bénéficiaires et souvent les acteurs décisifs de ces changements.

Les djihadistes, en écrasant les femmes par priorité, ne tuent pas que les femmes : ils enferment leurs peuples entiers dans l’arriération culturelle, économique et politique. La guerre qui se rallume de l’Afghanistan à l’Afrique de l’Ouest n’oppose pas véritablement l’islam à l’Occident, mais l’espérance en la modernité pour tous contre la régression crépusculaire vers des temps anciens où la vie était brève pour tous et quand les femmes étaient réduites à l’esclavage et à la maternité forcée.

En Occident, il se trouvera toujours quelques « idiots utiles » pour préférer le Hamas à Israël ou s’opposer par principe à toute intervention de l’armée américaine : leur seule excuse est d’être vraiment idiots ou pervers ou, comme Qutb, de ne pas supporter sans défaillir la vision d’une femme aux bras nus.

Par Guy Sorman, essayiste.

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