2019, année cruciale pour la biodiversité de l’océan

La haute mer s’étend sur pratiquement la moitié de notre planète – et forme une part immense et essentielle de l’écosystème mondial qui a jusqu’ici échappé à toute véritable réglementation, pourtant indispensable. Heureusement, cette situation est sur le point de changer. A partir du lundi 25 mars, les délégués se réunissent au siège de l’Organisation des Nations unies (ONU), à New York, pour entamer les négociations sur le texte d’un traité relatif à la biodiversité de la haute mer.

Le traité offre une chance unique de protéger les dernières grandes étendues sauvages de la Terre. Susceptible de devenir un des instruments les plus importants du droit environnemental international depuis des décennies, ce traité pourrait propulser la Convention de l’ONU sur le droit de la mer dans le XXIe siècle, et protéger la biodiversité marine et les habitats nécessaires à la vie marine de notre planète. Les informations au sujet des négociations sur la haute mer risquent d’être noyées au milieu du Brexit, des « gilets jaunes », du Venezuela ou du commerce international.

2019, année cruciale pour la biodiversité de l’océan

Pourtant, en ce qui concerne les répercussions à long terme sur l’avenir de l’humanité, ces discussions autour du traité pour l’océan éclipsent tout le reste. Nous devons nous saisir de cette occasion et protéger l’océan. Les multiples menaces qui pèsent sur l’environnement marin et tous ceux qui en dépendent atteignent des niveaux critiques pour ce qui est de la perte de la biodiversité marine et comme conséquence du changement climatique.

Augmentation de l’acidification des océans

Les scientifiques ont confirmé que 2018 était l’année la plus chaude jamais enregistrée pour l’océan mondial, un record qui sera sans doute bientôt dépassé. Un océan plus chaud aura pour conséquences des ouragans plus puissants, l’élévation du niveau des mers et la migration d’espèces vers des eaux plus froides ; il tuera également de précieux récifs coralliens. La chimie de nos mers est elle aussi en train de changer.

Après des millions d’années de stabilité, le CO2 présent dans l’océan cause désormais son acidification à un rythme cent fois plus élevé qu’à toute autre époque de l’histoire de l’humanité. Le plastique et la pollution sonore l’envahissent d’un pôle à l’autre, la surpêche se poursuit sans véritables contrôles et l’exploitation minière en eaux profondes est sur le point de saccager l’environnement marin.

Les populations de certaines des créatures les plus emblématiques de l’océan, par exemple le thon rouge du Pacifique ou la tortue luth, ont déjà décliné de façon catastrophique. Les Etats et d’autres grands acteurs font du sur-place depuis bien trop longtemps. Même si le bon état de l’océan est aujourd’hui plus que jamais au cœur des discussions, les mesures adoptées ne sont pas à la hauteur du rythme dramatique des changements que subit la vie marine. Il est temps de nous montrer plus ambitieux.

2019, une année cruciale

Tous les pays doivent s’unir et faire pression pour l’adoption d’un traité solide sur la haute mer – un cadre mondial qui fera pour l’océan ce que l’accord de Paris de 2015 vise pour le climat. Il doit être juridiquement contraignant, inclure des mesures strictes de conservation et de protection de la biodiversité de la haute mer, et être prêt pour signature en 2020, comme prévu. Le respect de ce calendrier serré nécessitera de la discipline et des capacités de mobilisation. Cela montrera également que le monde est encore capable de s’unir en faveur de solutions multilatérales bénéfiques pour tous.

Par conséquent, 2019 est une année cruciale pour stimuler l’action mondiale qui soutiendra la résilience et la biodiversité de l’océan. Les négociations sur le traité à New York coïncideront avec le 10e rassemblement annuel de la Monaco Blue Initiative, qui porte cette année sur l’extension et le renforcement des aires marines protégées. En cours d’année, le sommet du G20 au Japon et celui du G7 à Biarritz auront tous deux l’océan et la résilience côtière à l’ordre du jour. Mais les belles paroles ne suffisent plus.

Ces occasions de protéger l’océan doivent être des tremplins pour agir : des décisions doivent être prises cette année pour transformer les engagements mondiaux en actions pour l’océan. Les signataires de la Convention pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique se prononceront sur la protection de vastes zones de l’océan Austral fin octobre. En décembre, le Chili accueillera la COP « bleue » sur le climat, où l’importance de ce système climatique essentiel qu’est un océan en bon état doit être reconnue.

Une protection d’au moins 30 % de l’océan d’ici à 2030

Cela nécessitera d’investir dans les récifs coralliens, les mangroves et les herbiers marins pour protéger les communautés et les entreprises côtières, et pour améliorer la résilience au changement. La réunion à Pékin de la convention sur la diversité biologique fin 2020 devra alors suivre les recommandations scientifiques et adopter un objectif de protection solide d’au moins 30 % de l’océan d’ici à 2030. Tout objectif inférieur constituerait pour les dirigeants de la planète un impardonnable manquement à leurs devoirs.

Des décennies de travail des scientifiques et des activistes ont été nécessaires pour mettre la protection de l’océan à l’ordre du jour et offrir ainsi les multiples occasions de protéger l’océan qui se présenteront ces prochains mois. Cela ne se reproduira pas de sitôt. Alors que les communautés et les entreprises se rassemblent autour d’initiatives visant à sauver la vie marine, nous n’avons aucune excuse : nous devons adopter un traité solide sur la haute mer, respecter les objectifs de conservation marine adoptés à l’échelle internationale d’ici à 2020 et engager les prochaines actions.

La protection de l’inestimable trésor que constitue la biodiversité marine est essentielle si nous voulons combattre le changement climatique et nous assurer un avenir durable et équitable pour toute forme de vie sur Terre. Les Etats et les leaders économiques doivent écouter les communautés déjà affectées par le changement climatique. Et nous devons tous écouter les jeunes qui quittent leur école et défilent dans les rues pour dénoncer l’inaction face au changement climatique. Il faut en finir avec les réunions interminables qui n’aboutissent à aucun progrès réel. L’adoption de mesures de protection de notre océan, qui absorbe le surplus de chaleur et de CO2, et qui offre nourriture, médicaments, moyens d’existence et loisirs à des milliards de personnes, transmettrait le signal fort que nous sommes déterminés à assurer leur – et notre – avenir.

Richard Branson (PDG du groupe Virgin) et Albert II de Monaco (Prince souverain de Monaco).

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