Changement climatique : une nouvelle stratégie

Alors que les décideurs mondiaux se réunissent cette semaine à New York dans le cadre de la Climate Week, la pression monte afin d’aboutir à un nouvel accord sur le climat à Paris en décembre [dans le cadre de la COP21].

Le résultat de cette réunion jettera les bases de l’indispensable réponse globale pour faire face à la hausse des températures et aux dérèglements climatiques. Mais le changement ne pourra pas venir que des décideurs politiques à l’échelon national ; nous pensons que les collectivités territoriales et le secteur privé doivent eux aussi jouer un rôle important dans l’élaboration du plan d’action mondial de lutte contre le dérèglement climatique.

Les discussions autour du changement climatique ont commencé à évoluer. Jusqu’à une date récente, les efforts étaient concentrés sur les dirigeants politiques nationaux, incités à signer des traités contenant des engagements d’objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Quatre moyens d’action

Si fixer des objectifs est un bon début, cette approche verticale n’a pas permis de changer de façon significative les comportements sur le terrain. La communauté internationale a besoin d’une nouvelle stratégie pour le climat.

A cet égard, nous avons identifié quatre moyens d’action pour renforcer la réponse mondiale au changement climatique lors de la Conférence des Nations unies sur le changement climatique à Paris (COP21).

Tout d’abord, pour lutter plus efficacement contre le changement climatique, nous devons impliquer dans cet engagement une palette plus large d’acteurs politiques et économiques. Les présidents et les premiers ministres n’exercent pas de contrôle au quotidien sur les facteurs qui déterminent l’empreinte carbone d’une société. En revanche, les maires et autres présidents de collectivités territoriales ont souvent les moyens de mettre en vigueur des politiques et d’initier des actions adaptées beaucoup plus rapidement que les dirigeants nationaux.

Les entreprises ont également un rôle central à jouer dans la transition vers une économie bas-carbone. Une stratégie d’engagement élargie doit ainsi inclure les PDG et les responsables politiques au niveau local. Pour pousser les villes, les régions et les entreprises privées à agir en faveur de la lutte contre le changement climatique, leur action doit être mesurée, et leurs succès doivent être valorisés.

Mobiliser les capitaux privés

Ensuite, nous devons élargir le spectre du débat. Si les stratégies visant l’atténuation par le biais de la réduction des émissions demeurent importantes, elles doivent être associées à une nouvelle orientation axée sur l’adaptation. Les pays en voie de développement, notamment, sont déjà aux prises avec les premiers effets du changement climatique : les modifications du régime des précipitations, l’intensité accrue des ouragans et l’élévation du niveau de la mer dévastent les communautés traditionnelles et leurs moyens de subsistance.

Pour les populations mondiales les plus exposées, une baisse des émissions dans le monde industrialisé ne suffit pas à répondre à leur besoin urgent de sécurité, de résilience et de progrès économique. Le financement des mesures que la communauté internationale doit prendre pour éviter des dommages climatiques catastrophiques a fait l’objet d’intenses discussions.

Une grande partie de ces discussions – et des manœuvres politiques qui les ont accompagnées – ont été consacrées à établir la juste participation financière des pays vus comme les responsables historiques des émissions de gaz à effet de serre. Ces questions sont complexes et légitimes. Mais, là aussi, les résultats ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Il nous faut donc une nouvelle stratégie financière en matière de climat, utilisant des ressources publiques limitées pour mobiliser les capitaux privés. Cela plaide en faveur de la création de nouvelles structures – banques vertes, obligations vertes, autres mécanismes financiers créatifs – au service de l’adaptation, de l’efficacité énergétique, et de l’indispensable transition vers un avenir axé sur l’énergie propre.

Un énorme gisement de transformation

Enfin, nous devons élargir nos efforts pour réduire les émissions. Jusqu’à présent, l’attention a été portée en priorité sur la réduction des émissions liées à l’offre. Augmenter la production d’énergies renouvelables et arrêter les subventions accordées aux combustibles fossiles continueront à être des leviers d’action importants.

Mais il faut aussi miser sur l’autre versant de l’équation énergétique, celui de la demande. En effet, les investissements en faveur de l’efficacité énergétique, rapidement rentables, offrent un formidable potentiel dans le cadre du programme mondial d’atténuation du changement climatique. Les opportunités offertes par les bâtiments existants et les constructions nouvelles sont significatives.

Les bâtiments sont responsables pour environ 40 % de la consommation mondiale d’énergie et de 25 % des émissions globales de CO2 ; ils représentent donc un énorme gisement de transformation.

Dans de nombreux pays industrialisés, seulement 1 % des bâtiments existants sont rénovés chaque année, ce qui signifie que la grande majorité des bâtiments tertiaires et des logements sont équipés de technologies dépassées en matière d’éclairage, de chauffage et de ventilation – et consomment ainsi beaucoup plus d’énergie que nécessaire. Des programmes d’efficacité énergétique existent déjà, et sont souvent le fruit de partenariats productifs entre les gouvernements, les « utilities » et les entreprises locales.

Mesures d’incitation

Mais ces efforts doivent être étendus et assortis de mesures d’incitation récompensant l’efficacité énergétique. Alors que tous les regards se tournent vers Paris à l’approche de la COP 21 en décembre, la communauté internationale a besoin d’un programme revigoré de lutte contre le changement climatique.

Nous pensons que tout nouvel engagement doit inclure un partage plus étendu des responsabilités dans la lutte contre le changement climatique et des efforts pour souligner les progrès réalisés notamment par les villes, les régions, et les entreprises. Le recadrage des discussions afin d’inclure l’adaptation, la gestion de l’énergie par l’utilisateur final, et des sources de financement plus larges contribuerait également à augmenter l’impact de la réponse mondiale au changement climatique.

Comme en témoigne l’accueil positif reçu par Anne Hidalgo suite à son invitation au Sommet des élus locaux pour le climat à la mairie de Paris le 4 décembre 2015, les maires et les responsables politiques régionaux et locaux sont prêts à agir, et le nouvel accord sur le changement climatique de Paris devrait leur en donner les moyens.

Daniel C. Esty (Professeur de droit et politique environnementale, Université de Yale).
Rudy Provoost (Président directeur général du groupe Rexel).

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