Divorces : l'Europe doit harmoniser ses politiques

Entre le mariage homosexuel et les coups d'éclat médiatiques de pères divorcés dénonçant le partage de l'autorité parentale, les évolutions du mariage et du divorce sont au cœur de l'actualité.

Un scandale reste pourtant largement ignoré : celui du traitement de certains divorces binationaux. Les parents concernés doivent-ils céder à la surenchère médiatique et poser des actes désespérés pour se faire enfin entendre de leur gouvernement ?

Nous nous battons depuis des années sur la question des divorces en Europe. Les problèmes de pensions alimentaires et de partage de l'autorité parentale sont exacerbés dès qu'ils impliquent des Etats différents.

Des centaines de parents sont entraînés dans des procédures juridiques interminables et confrontés à des administrations aux discours contradictoires. Désespérés, certains en viennent à enfreindre la loi pour retrouver l'enfant dont ils ont "légalement" été séparés.

13% DE COUPLES BINATIONAUX

A l'heure d'Erasmus et de la liberté de circulation, alors que, déjà, 13% des couples d'Europe sont binationaux, l'enjeu est considérable. Pourtant, la coopération européenne en droit de la famille demeure balbutiante. Des accords européens permettent l'application automatique des décisions de justice d'un Etat dans un autre, alors même que les législations familiales nationales n'ont connu aucune harmonisation.

En France, les tribunaux tendent à privilégier le maintien d'un contact de l'enfant avec ses deux parents, quitte à organiser une résidence alternée – solution impensable en Allemagne, où les juges n'hésitent pas à interdire l'accès d'un parent à son enfant, surtout si ce dernier réside à l'étranger, par crainte d'enlèvement !

Certains services sociaux, tout-puissants, peuvent, si vous ne vous pliez pas à leurs décisions parfois arbitraires, vous empêcher de voir votre enfant jusqu'à sa majorité.

Savez-vous qu'au Royaume-Uni, une mère s'est vu retirer l'enfant par les autorités directement après l'accouchement car, étant muette, elle "n'aurait pu élever son enfant dans des conditions acceptables" ? Savez-vous qu'en Allemagne, un père ayant obtenu la garde de son enfant handicapé mental par la justice ne l'a jamais revu parce que les services sociaux en avaient décidé autrement ? Savez-vous qu'au Danemark, la justice a attribué l'autorité parentale à l'un de ses ressortissants ayant kidnappé son enfant en Autriche ?

CRÉER UNE POLITIQUE EUROPÉENNE DES DIVORCES

Des mandats d'arrêt européens ont été lancés contre des parents français victimes de la non-coopération entre Etats européens en matière de justice familiale. Ils sont en prison ou en attente d'extradition. Combien faudra-t-il encore de vies brisées, combien de procédures kafkaïennes, pour que les gouvernements réagissent ?

Les Etats éludent le problème en s'abritant derrière la règlementation européenne : c'est pourtant aux responsables politiques nationaux qu'il revient de négocier avec leurs partenaires.

Nos administrations arguent des limitations de leur périmètre de compétence : là encore, ce serait aux responsables politiques de permettre une approche moins segmentée, plus globale, de ces dossiers complexes.

Ce sont bien les Etats qui, souhaitant tous garder leurs prérogatives en matière d'état civil et de divorce, empêchent toute résolution de ce problème européen.

Renouons le dialogue entre tous les acteurs, créons des médiateurs puissants dans chaque pays membre (sur le modèle de notre Défenseur des droits), confrontons les points de vue des Etats et organisons un modèle conciliant intérêt de l'enfant, droits des parents et intervention de l'Etat, pour ramener de la sérénité au sein des familles.

N'oublions pas que les enfants d'aujourd'hui feront l'Europe de demain.

Joëlle Garriaud-Maylam, sénatrice représentant les Français établis hors de France et Philippe Boulland, député européen

Deja una respuesta

Tu dirección de correo electrónico no será publicada. Los campos obligatorios están marcados con *