En finir avec la planète plastique

Dans une décharge de Java, le 5 juin. Photo Juni Kriswanto. AFP
Dans une décharge de Java, le 5 juin. Photo Juni Kriswanto. AFP

A l’échelle mondiale, depuis l’arrivée du plastique dans les années 50, pas moins de 10 milliards de tonnes de plastique ont été produites. La moitié a fini dans la nature ou dans les océans, causant une pollution sans précédent et des dommages irréversibles pour la biodiversité terrestre et marine mais aussi pour la santé humaine. Et d’ici à 2050, avec la progression démographique, 28,7 milliards de tonnes de plastique seront générées. Le triple de tout ce qui a été produit jusqu’à aujourd’hui. C’est dire l’ampleur du défi qui est devant nous, et c’est dire l’ampleur de la catastrophe écologique et sanitaire qui est devant nous si nous ne faisons rien ou trop peu.

Si la nouvelle directive proposée par la Commission européenne va dans le bon sens, ses propositions restent pourtant timides et faibles à l’aune des problèmes que le plastique cause pour la planète. Or, pour sortir la planète de l’ère de la société du déchet, les micro-mesures ne suffiront pas à endiguer la progression spectaculaire de plastique qui s’annonce. Il faut donc en finir avec la logique des petits pas, et faire le choix de réformes ambitieuses en donnant un horizon clair de sortie du modèle du tout plastique et du tout jetable ; et interdire une fois pour toutes le plastique à usage unique.

Nouveau modèle

Je propose donc au Parlement européen de transformer cette directive, en fixant en Europe à 2025 la fin de tous les plastiques à usage unique. Que cette interdiction devienne le principe et non l’exception comme la Commission le propose. Car si nous ne prenons pas des mesures législatives fortes, rien ne changera. Ni demain, ni dans cinquante ans. Je dis à l’Europe qu’il ne suffit plus d’additionner les bonnes pratiques des uns et des autres, mais de jeter les bases réglementaires d’un nouveau modèle de production et de consommation moins polluant.

Une interdiction de tous les produits plastiques à usage unique en 2025 donne à l’industrie et aux consommateurs le temps de s’adapter à cette nouvelle réalité. Elle donne le temps à tous de s’adapter à des habitudes de vie génératrices de moins de déchets plastiques et surtout de moins de déchets tout court. Et en toute logique écologique, mieux vaut d’abord éviter qu’un déchet ne soit produit. Dans tous les cas, rien ne justifie l’existence de produits plastiques à usage unique quand des alternatives durables et non polluantes existent. A quoi bon continuer d’autoriser à produire des lingettes, des sacs, des gobelets, assiettes, des bouteilles, des bols et des couverts en plastique, des bâtonnets de sucettes, mais encore des films étirables, des sachets de thé en nylon, des chewing-gums, tous à base de plastique et à usage unique, et tous facilement remplaçables ou supprimables ?

Véritable fléau

A quoi bon continuer à produire des produits dangereux qu’aucune sorte de tri ou de recyclage ne pourra empêcher de s’épandre pour des siècles dans l’environnement et à contaminer tous les organismes vivants ? A quoi bon laisser les industriels et les entreprises libres d’utiliser le plastique comme bon leur chante et pour absolument tout, sans règle ou presque ? Il en va aussi de même pour les mégots de cigarettes. Les gens ignorent que lorsqu’ils fument une cigarette, ils fument du plastique, et que celui-ci et les substances qui le composent se répandent ensuite dans l’environnement. Rien qu’en France, 100 millions de mégots seraient, chaque jour, jetés par terre ! Et à l’échelle du monde, on estime le nombre de mégots jetés dans les rues chaque année à 4 300 milliards. Il est temps de demander à l’industrie du tabac de modifier les composants des filtres de cigarettes, car les mégots sont un véritable fléau pour l’environnement. Il est aussi temps pour l’industrie du tabac de payer pour les frais liés à la collecte, au recyclage et à la dépollution de l’environnement, causés par les cigarettes.

Ce sont l’ensemble des producteurs de plastique qui sont directement responsables de cette pollution gigantesque, dont la seule logique est le profit au détriment de la planète. Cet envahissement par le plastique est révélateur d’une conception de la production industrielle court-termiste en rupture avec les intérêts du milieu naturel. Il est aussi révélateur de modes de consommation qui répondent aux injonctions d’une idéologie dominante. Seule une rupture avec l’ultra-consumérisme poussé par les industriels permettra peut-être d’éviter la catastrophe. Si nous ne faisons rien aujourd’hui, il ne faudra plus parler demain d’un septième continent plastique, mais d’une planète plastique.

Younous Omarjee, député européen, La France Insoumise (France)

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