En Namibie, les Chinois ont introduit la corruption à grande échelle

Namibians queue to vote at a polling station in Windhoek, Namibia Friday Nov. 27, 2009. Namibia's longtime ruling party may see its grip on this desert nation weakened in elections that began Friday, with a challenge from a new breakaway party hoping to attract voters dissatisfied with corruption and leadership scandals. (AP Photo/Dirk Heinrich)
Namibians queue to vote at a polling station in Windhoek, Namibia Friday Nov. 27, 2009. Namibia's longtime ruling party may see its grip on this desert nation weakened in elections that began Friday, with a challenge from a new breakaway party hoping to attract voters dissatisfied with corruption and leadership scandals. (AP Photo/Dirk Heinrich)

En 1990, dans le berceau de son indépendance de l’Afrique du Sud, la Namibie avait alors beaucoup d’atouts enviables: 2,5 millions d’habitants pour une surface 825 000 km2, pas de dettes, des diamants, de l’uranium, du cuivre, des poissons, de la viande, des infrastructures routières excellentes, de l’électricité, des institutions bien établies pour fonctionner comme un Etat de droit, des paysages grandioses, etc.

Mais quelques ombres étaient au tableau: un chômage entre 25-50%, et surtout des promesses faites par la Swapo, parti actuel au pouvoir, à la Chine dont l’aide avait été très modeste à l’époque (1960-1965), une «dette idéologique» à son égard qui plombe maintenant le pays. Cela sans comparaison avec l’aide d’alors et le soutien apporté par l’ONU, l’Europe, les Eglises, les mouvements anti-apartheid.

Modèle de démocratie pendant vingt ans

Ainsi, pendant vingt ans, enfant chéri de l’Afrique, le pays a été un modèle de démocratie, de respect des droits de l’homme pour lesquels l’ancienne génération avait combattu afin de se libérer de la tutelle sud-africaine et de son apartheid. Aujourd’hui, vingt-six ans après, force est de reconnaître une certaine usure du pouvoir due aux vautours extérieurs que sont la mondialisation commerciale qui accélère les inégalités sociales et certaines multinationales qui dépècent la Namibie à petites et grandes bouchées.

Des signes inquiétants montrent que les Chinois (gouvernement, hommes d’affaires, employés) ont leur mot à dire dans la gouvernance namibienne par ministres interposés. Ils ont introduit la corruption à grande échelle avec pour conséquence l’affaiblissement de la démocratie étant donné que, pour eux, les droits de l’homme sont «secondaires» comme l’avait déclaré l’ancien président Hu Jintao.

La pauvreté a explosé

La pauvreté a aussi explosé dans une grande partie de la population. Le chômage hypothèque la vie des jeunes qui n’ont pas tous des formations professionnelles adéquates.

Les vautours de l’intérieur, en grande partie «les élites», ont tissé des liens entre le public et le privé, et sont saisis par la folie des grandeurs avec l’aide d’hommes d’affaires chinois notamment. Ils vendent leur pays au plus offrant. Qui s’occupe des pauvres? Pour un petit pourcentage le gouvernement, mais surtout des ONG, les Eglises ou des privés.

A signaler cependant une aide aux vieux – il n’y en a pas beaucoup, ils meurent avant 60 ans – qui reçoivent une assurance vieillesse de 80 francs par mois. L’inflation de 3% a rendu la vie très chère et l’on se demande comment vit la majorité des habitants.

Pour la première fois en vingt-six ans, les Namibiens ont organisé une marche de protestation disciplinée le 16 juin à l’appel du mouvement Affirmative Repositioning pour dénoncer les incompréhensibles déviances de leur gouvernement et le mépris des gouvernants pour le peuple juste bon à voter et à se taire.

Construction d’un nouveau parlement

Ils reprochent au gouvernement de ne pas mettre vraiment en œuvre le plan de lutte contre la pauvreté appelé Harambee. «Hélas, ce ne sont que des mots», écrit Gwen Lister dans The Namibian du 27 mai, une journaliste namibienne admirable qui avait combattu la présence sud-africaine pendant des années et mis sa vie en danger. «C’est en totale contradiction avec les faits.»

Autres reproches, le gouvernement envisage la construction d’un nouveau parlement, car l’ancien construit par les Sud-Africains, même rénové, ne suffit plus aux parlementaires qui ont besoin de plus de luxe et de prestige: 300 bureaux, 400 chambres pour eux-mêmes, fitness, centre médical, amphithéâtre. Coût: 2,4 milliards de dollars namibiens ou rands (153 millions de francs) auxquels s’ajoute aussi une somme astronomique pour la rénovation du bureau du président.

«En trois ans, ajoute Gwen Lister, l’évaluation de la somme a triplé!»: ce sont les petits vautours qui picorent à droite et à gauche pour s’enrichir rapidement. Qui aide à la rénovation de ce bureau? Une compagnie chinoise China Jiangsu International Group par l’intermédiaire d’un Namibien Nghipondoka qui a reçu le contrat.

Le chaos dans dix ans…

Aux dernières nouvelles le projet du parlement aurait été gelé… A ces folies s’ajoutent celles du président Hage Geingob lui-même et de son partenaire chinois, M. Jack Huang, pour une transaction privée effectuée par la société Africa Sunrise Investment Pty Ltd. où les arrangements juridiques sont bien établis: il s’agit de construire un quartier de 400 habitations, 24 villas, deux grands bâtiments et un hôtel sur la route qui mène à l’aéroport.

Etrange, n’est-ce pas? Cela sur une surface agricole, ce qui est en contradiction avec la loi, puisque la terre ne peut être vendue à des étrangers. Mais qu’importe! Les Namibiens, qui n’étaient pas habitués à ces extravagances et à ces arrangements comme dans d’autres pays, sont ulcérés et tristes, car il y a d’autres priorités.

Ils comprennent peu à peu que tout cela est préparé pour les Chinois qui continueront d’arriver. La presse encore libre comme sous l’apartheid (mais pour combien de temps encore?) s’en fait l’écho. Le gouvernement voudrait même exiger des visas des entrepreneurs sud-africains, alors que des liens historiques et économiques les lient depuis 1920! Bien sûr, les entrepreneurs et hommes d’affaires chinois veulent faire des affaires… Deux Namibiens, anciens hommes d’affaires, font le même constat: ce sera le chaos en Namibie dans dix ans…

Christine von Garnier, sociologue et journaliste.

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