Enseignons un islam sans haine des juifs

L’implication des jeunes musulmans dans les actes antisémites va croissant. Les pouvoirs publics expliquent cette situation par le cloisonnement ethnique et social. D’autres évoquent le blocage politique au Proche-Orient. La marginalisation sociale combinée aux difficultés entre Palestiniens et Israéliens est un facteur de taille pouvant expliquer les comportements anti-juifs d’une frange de la population musulmane. Ceci ne semble pas toutefois l’unique cause.

Dans la société musulmane l’antisémitisme est bien ancré depuis fort longtemps. Ne serait-ce que le statut de « dhimmi » accordé aux juifs par les musulmans jusqu’à la chute de l’empire ottoman est un bon révélateur de l’antisémitisme à l’époque. Et cela perdure aujourd’hui. Les Palestiniens tentent de créer leur Etat ; ce qui est légitime. Mais alors, pourquoi, si ce n’est pas de l’antisémitisme, d’autres musulmans, dans d’autres pays, s’en prennent à des juifs ? En comparant avec la guerre d’Algérie, ce ne fut apparemment pas le cas des Français malgré leur présence encore importante à cette époque dans les pays musulmans d’Afrique.

La privation des Palestiniens d’un Etat entretien l’antisémitisme chez bon nombre de musulmans. Il est vrai que l’extrême droite israélienne cherche constamment à torpiller d’éventuels accords. Il faut avouer aussi que les dirigeants palestiniens ont perdu des occasions pour la création d’un Etat en refusant notamment deux opportunités : la résolution de l’ONU en 1948, et l’Etat proposé en 2000 lors du sommet de camp David II. Est-ce par crainte d’un pays voisin juif que les dirigeants palestiniens refusent sans cesse le partage de la Palestine ?

Dans tous les cas, ce n’est point du bon sens puisque dans le même temps, des peuples sont en souffrance et Israël continue à grignoter des territoires. L’antisémitisme chez de nombreux musulmans semble plus en relation avec une mauvaise interprétation de l’Islam qu’en lien avec des problèmes politiques et sociaux.

Le Coran, livre sacré de l’Islam, est constitué de chapitres appelés sourates, elles-mêmes composées de versets. Or, des versets en dehors de leur contexte sont souvent derrière des préjugés anti-juifs. Prenons l’exemple de sourate Al-Baqara (la vache en arabe). La tradition musulmane a donné comme titre à cette sourate La Vache, du fait d’un dialogue dans la sourate entre Moïse et le peuple juif à propos d’une vache devant être sacrifiée. Un préjugé anti-juif chez les musulmans semble provenir du 74ème verset de cette sourate : « Puis, et en dépit de tout cela, vos cœurs se sont endurcis ; ils sont devenus comme des pierres ou même plus durs encore ; car il y a des pierres d’où jaillissent les ruisseaux, d’autres se fendent pour qu’en surgisse l’eau, d’autres s’affaissent par crainte d’Allah. Et Allah n’est certainement jamais inattentif à ce que vous faites ».

Les effets pervers de la laïcité

Ce verset semble induire chez de nombreux musulmans un préjugé sur les juifs considérés comme des êtres durs et inhumains. La relecture de la totalité du chapitre nous révèle pourtant qu’il n’en est rien dans les paroles de Dieu. Dans cette sourate, Dieu s’adressant aux juifs, son premier peuple choisi : « Ô Enfants d’Israël, rappelez-vous mon bienfait dont je vous ai comblés, que je vous ai préférés à tous les peuples » (47ème verset)…

« Mais, à ces paroles, les pervers en substituèrent d’autres, et pour les punir de leur fourberie Nous leur envoyâmes du ciel un châtiment avilissant » (59ème verset). En fait, Dieu semble en colère contre une partie des juifs. Ceux qui ne l’ont pas suivi, en somme les non croyants. Or, ces derniers ne sont pas nécessairement plus nombreux chez les juifs que chez les musulmans.

La lutte contre l’antisémitisme devient une priorité. Et l’école est un lieu parfait pour sensibiliser les jeunes contre toute dérive antisémite. La laïcité dans les établissements publics semble toutefois avoir des effets pervers. En effet, dans la mesure où divers actes antisémites se font aujourd’hui au nom de l’Islam dont l’apprentissage se fait souvent sans un véritable encadrement de l’Etat. En ce sens, il nous apparaît que l’éducation religieuse est plus que jamais du ressort de l’Etat.

Mounir Mamoghli est géographe et professeur de mathématiques au lycée Jacques Feyder à Epinay-sur-Seine en Seine-Saint-Denis.

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