Faire face aux migrations climatiques

Faire face aux migrations climatiques
Photo: Luis Tato Agence France-Presse

Alors que nous assistons à une augmentation fulgurante des catastrophes climatiques, les États enregistrent un nombre grandissant de mouvements de population. Il suffit de regarder les vagues de personnes migrantes ayant déferlé sur l’Europe en 2015 ou l’afflux de migrants venus d’Amérique latine à la frontière canado-américaine en 2018 pour en mesurer l’ampleur.

La dégradation de l’environnement ainsi que les phénomènes climatiques extrêmes ne sont pas étrangers à ces mouvements de population. En effet, alors que de nombreux pays d’Asie et États insulaires voient le niveau de la mer monter de façon inquiétante, plusieurs pays d’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient font quant à eux face à une désertification grandissante, rendant impraticable l’agriculture comme mode de subsistance. Les pays d’Amérique latine affichent eux aussi une grande vulnérabilité aux phénomènes climatiques extrêmes, affectant les conditions de vie des habitants.

Avec l’intensification à venir des changements climatiques, les flux migratoires subiront la même tendance, forçant de nombreux États à gérer l’afflux de migrants sur leur territoire. Jusqu’à présent relativement épargnés, le Canada et le Québec ne feront pas exception à cette réalité. Déjà, on assiste aux déplacements de plus en plus nombreux de personnes issues des Premières Nations vers des villes du sud du pays en raison des changements climatiques.

Une hausse marquée d’ici 2050

Dans ce contexte, comment s’adapter en tant que pays appelé à accueillir ces personnes migrantes ? Faisons d’abord un survol de la situation.

Les experts estiment que des millions, voire jusqu’à un milliard d’êtres humains pourraient migrer en raison des changements climatiques d’ici 2050. En 2018, 17,2 millions de nouvelles migrations internes ont été dénombrées à la suite de catastrophes naturelles, relève l’Organisation internationale pour les migrants. Cela représente environ deux migrations internes sur trois. Au Canada, les personnes issues des Premières Nations étaient affectées de façon disproportionnée, représentant 78 % des personnes migrantes canadiennes.

Chaque mardi, Le Devoir offre un espace aux artisans d’un périodique. Cette semaine, nous vous proposons une version abrégée d’un texte paru dans la revue À bâbord !, décembre 2020, no 86.

Pas de consensus sur les termes

Réfugiés. Exilés. Migrants. Voilà des termes souvent utilisés comme des synonymes pour définir les personnes qui quittent leur milieu de vie. Pourtant, ces termes renvoient à des réalités bien différentes.

Le terme réfugié est tiré de la Convention relative au statut des réfugiés, dite Convention de Genève, adoptée en 1951. Il désigne toute personne « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». Plus général, le terme migrant désigne quant à lui « toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir à titre temporaire ou permanent et pour diverses raisons, soit dans une autre région à l’intérieur d’un même pays, soit dans un autre pays, franchissant ainsi une frontière internationale ».

Si plusieurs sont tentés d’utiliser le terme réfugié pour définir les personnes qui quittent leur milieu de vie en raison des changements climatiques, cette utilisation est erronée. En effet, les changements climatiques n’apparaissent pas comme un motif de persécution comme l’entend le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. De plus, la notion de réfugié renvoie aux déplacements interfrontaliers de population, alors que les migrations climatiques ont actuellement tendance à être des déplacements internes.

Cette inéquation entre la Convention de Genève et la situation des migrants climatiques soulève un enjeu de taille, soit l’absence de protection qui leur est offerte. Aucun outil juridique ne protège actuellement les droits de ces individus, alors en proie à des situations d’injustice et de non-respect de leurs droits fondamentaux.

Devoir éthique et vision d’avenir

Un grand paradoxe entoure les changements climatiques : les États ayant généré le plus d’émissions de gaz à effet de serre pour assurer leur développement ne sont généralement pas ceux qui seront les plus directement touchés par les effets des changements climatiques. Dans ce contexte, il est du devoir des gouvernements de mettre en place les mesures pour assurer une migration sûre et sécuritaire.

En l’absence d’une réponse coordonnée et adaptée facilitant les migrations volontaires, les conséquences peuvent être importantes. Urbanisation croissante, pression sur les infrastructures, conflits, dégradation de l’environnement sont quelques risques que courent les pays appelés à recevoir les personnes migrantes dans le contexte de déplacements forcés.

Si l’avenir ne laisse présager aucun répit quant à l’afflux de migrants climatiques, il est impératif que les gouvernements soient saisis de la question afin d’agir de façon responsable et solidaire pour faciliter les migrations volontaires et réduire les migrations forcées liées aux changements climatiques.

Vanessa Cournoyer-Cyr, Consultante en développement régional et en communications.

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