Humanitaire: semaine cruciale à Genève

Camp de réfugiés dans les Balkans, été 2015.
Camp de réfugiés dans les Balkans, été 2015.

Une semaine cruciale s’ouvre à Genève pour la communauté humanitaire internationale. Des délégués du monde entier participeront aux consultations globales pour le Sommet humanitaire mondial afin de débattre des enjeux et des orientations futures de notre action.

Les Nations unies ont mené ces dix-huit derniers mois des consultations intensives pour tenter d’apporter de meilleures réponses à quelques-unes des questions graves qui se posent à nous.

Au programme, des problèmes tels que la façon dont la communauté humanitaire coopère et coordonne son action, finance l’aide nécessaire pour atténuer les souffrances engendrées par des conflits qui perdurent dans presque toutes les régions du monde, et utilise la technologie pour ne pas se laisser dépasser par des besoins toujours croissants.

Alors que ces consultations en vue du Sommet humanitaire mondial qui se tiendra à Istanbul en mai prochain touchent à leur fin, il est important de nous rappeler quelques-uns des fondements de l’humanitaire moderne.

Nous venons de commémorer, au sein du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, le cinquantième anniversaire de l’adoption officielle de nos principes humanitaires – humanité, impartialité, neutralité, indépendance, volontariat, unité et universalité.

Comme le droit des conflits armés, ou droit international humanitaire, ces principes sont au cœur de notre action dans les conflits et autres situations de violence, souvent durables, qui déchirent tant de régions de la planète.

Politisation de l'aide humanitaire

Nous nous heurtons toutefois à des difficultés considérables dans nos efforts pour les mettre en pratique et honorer notre mandat, qui est de veiller à ce que les États et les groupes armés non étatiques respectent leurs obligations au regard du droit des conflits armés.

Nombreux sont les contextes où l’on semble abandonner le principe d’humanité – principe fondamental de respect mutuel entre tous les êtres – à une spirale de violence, de déplacement forcé, de famine, de viols et d’exécutions sommaires.

Mais c’est la politisation de l’aide humanitaire qui menace le plus gravement notre capacité de prêter assistance dans certains contextes.

D’une part, les États estiment parfois que cette aide les exonère de la nécessité de trouver des solutions politiques aux nombreux conflits de longue durée qui brisent tant de vies humaines.

D’autre part, notre assistance est souvent considérée comme légitimant des visées politiques. La réalité est tout autre: nous pouvons fournir des services impartiaux parce que nous sommes une organisation neutre, mais il faut pour cela que notre identité neutre et impartiale soit acceptée et respectée.

Que signifie cette politisation dans la réalité? S’il faut désormais trois semaines, et non plus trois jours, pour négocier le passage sans risque d’un convoi d’aide humanitaire à travers les lignes de front, elle signifie bien sûr une grande souffrance pour ceux qui attendent désespérément des secours.

De fait, l’enjeu n’est pas seulement un secteur humanitaire mieux organisé et plus efficace, mais l’ancrage même de l’humanitaire dans des normes et des valeurs.

Pour un contrat renouvelé

Il est temps que nous établissions un nouveau contrat mondial d’humanité entre les sociétés, liant tant les États que les groupes armés non étatiques et les individus – un contrat qui réaffirme l’engagement de respecter activement le droit international humanitaire, de soutenir concrètement ceux qui protègent et aident les plus vulnérables, et de rendre des comptes pour tout manquement à l’humanité.

Il s’agit là d’efforts concrets pour donner un sens lui aussi concret à un principe.

Les consultations globales qui auront lieu cette semaine à Genève marquent un moment important dans le dialogue entre les Nations unies et le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge sur la voie à suivre pour transformer ce projet en actes. Ces échanges se poursuivront avec les représentants des États à la Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge qui se tiendra en décembre.

Il nous faudra être nombreux, pendant notre réunion cette semaine, à souscrire à des engagements mesurables visant à changer les comportements des parties aux conflits et à améliorer la protection. Si le Sommet ne prend pas de mesures substantielles pour relever le défi capital de la protection, les conflits armés et l’action humanitaire n’auront plus qu’à retourner au statu quo.

Dans toutes nos discussions, nous devrons garder constamment à l’esprit les énormes souffrances qu’engendre la propagation de la violence et des conflits, et tout mettre en œuvre pour trouver les meilleurs moyens de réellement changer la vie des millions de personnes prises au piège de cette violence.

Peter Maurer, président du Comité international de la Croix-Rouge.

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