Israel et les Arabes: une dialectique sans réponse ?

On ignore l’origine de la fable, mais elle est bien connue en Egypte. C’est l’histoire du scorpion qui voulait traverser le Nile. Malheureusement il ne savait pas nager. Il rendit donc visite à la grenouille pour lui demander si elle le laisserait monter sur son dos et si elle serait d’accord de le transporter vers l’autre rive du fleuve.

« Il n’en est pas question » répondit la grenouille « si je te laisse monter sur mon dos tu vas me piquer ». « Réfléchis » répondit le scorpion « si je te pique durant la traversée tu vas certes mourir mais moi aussi car je vais me noyer. »

Après avoir longtemps réfléchit, la grenouille en conclut que le raisonnement du scorpion se tenait. Elle l’autorisa donc à monter sur son dos et entreprit de traverser le fleuve. Arrivés à mi-course, le scorpion soudainement piqua la grenouille. Alors que les deux agonisaient, la grenouille, dans un dernier souffle demanda au scorpion « pourquoi as-tu fait cela. Est-ce que nous méritions vraiment cette punition ? « « Oui « répondit le scorpions « nous la méritions car nous avons oublié, toi et moi, que nous sommes au Moyen Orient. »

LE MOYEN ORIENT

Le Moyen Orient. Peu de régions du monde ont fait l’objet d’autant de partages territoriaux, de promesses contradictoire, d’espoirs trahis, de rêves inassouvis, de traités éphémères et d’ambitions déçues.

L’irruption du Sionisme dans ce maelstrom a été un détonateur de plus dans une poudrière. Le mouvement Sioniste vit le jour en Europe Centrale essentiellement en réaction à l’antisémitisme et se donna comme mission de promouvoir l’équivalent d’un état juif dans ce qui était alors la Palestine sous domination Ottomane

La chute e l’empire Ottoman vit la Palestine passer sous mandat Britannique. Il appartenait désormais à Londres de gérer une immigration Juive certes contenue mais constante et qui fut perçue par les Arabes Palestiniens comme une forme d’invasion de la part d’Européens. Pour les Juifs, en revanche, c’était le retour à la Terre Promise.

La défaite du troisième Reich comme les révélations de l’Holocauste accéléra une immigration que les anglais n’arrivaient plus à contrôler.

PRTAGE REFUSE

Les deux communautés – Palestiniens Juifs et Palestiniens Arabes étant a couteux tirés et en l’absence to toute espoir d’accord l’ONU décida, le 29 novembre 1947 de partager la Palestine en deux comprenant une zone Arabe et une zone Juive avec Jérusalem sous contrôle international.

La partition fur acceptée comme un moindre mal par les palestiniens Juifs et rejetée catégoriquement par l’ensemble du monde arabe. Le 15 mai 1948 le mandat Britannique sur la Palestine prit fin et les palestiniens Juifs proclamèrent l’état d’Israël. El le même jour les armées de cinque pays arabes partirent á l’assaut du nouvel état.

Dans un autre contexte la question aurait été « pourquoi ». Que la division de la Palestine ait put poser un problème pour les Palestiniens Arabes était concevable. Mais en revanche elle n’affectait en rien les intérêts ou la sécurité des pays arabes tels que l’Egypte, l’Arabie Saoudite ou même la Syrie. Leur détermination, selon l’expression en cours de « jeter les Juifs à la mer » ne relevait donc pas d’un calcul géopolitique. De même, en ce qui concernait le plan de partage de l’ONU, si celui-ci allouait aux Juifs Palestiniens un territoire proportionnellement plus grand par rapport à leur population que celui alloué aux Arabes Palestiniens, le différend n’était pas là. Ce qui était en cause ce n’était pas tant le tracé du plan de partage ; c’était le concept même du partage. En d’autres termes le conflit n’était pas territorial mais existentiel.

PAS DE COMPROMIS

Dans un autre contexte il est possible que les parties en présence auraient accepté un compromis. Mais dans la partie du monde qui avait été le berceau de trois grandes religions la notion de compromis n’était pas à l’ordre du jour ; ce fut donc une véritable déferlante venue du monde Arabe qui fit marche ver le nouvel état.

Le dos au mur, sans possibilité de retrait et avec en arrière plan la mémoire de l’Holocauste, les israéliens se battirent avec l’énergie du désespoir. Confrontés à des armées arabes mieux armées mais peu motivées et mal commandées non seulement ils réussirent à préserver les territoires qui leur avaient été alloués par le plan de partage mais les agrandirent et lorsque un armistice fut signé en février 1949 ils ne les avaient pas seulement presque doublés mais avaient aussi conquis une partie de Jérusalem.

OCCASIONS PERDUES

Ni le plan de partage de 1947, ne la ligne d’armistice de 1949 ne changèrent le fond du problème. Sur le papier chaque partie avait un territoire et donc par définition le potentiel de créer un état. Ainsi la logique, pour ne pas dire une appréciation rationnelle des rapports de forces entres parties au conflit, laisserait croire qu’en 1947 et en 1949 deux occasions pour arriver a une solution négociée furent perdues. En fait elle n’étaient pas perçues comme telles Car si l’aspiration á la « terre promise » de la part des Juifs Palestiniens était un acte de foi susceptible de se concrétiser en une solution territoriale, la négation de cette aspiration par ce qui passait pour le « Monde Arabe » était lui aussi un acte de foi qui n’était pas sujet a négociation.

TROIS NON

Le résultat, du coté Arabe, fut la politique des « trois non ». Pas de paix, pas de reconnaissance, pas de négociation. Si la guerre des six jours de 1976 marqua l’apogée de la force militaire d’Israël, et la guerre du Kippour de 1973 ses limites, la problématique de base resta la même avec une épine de plus ; la question des refugiés palestiniens.

REFUGIES

Suite à la création de l’état d’Israël quelques 720 000 Arabes Palestiniens cherchèrent refuge dans les pays arabes environnants. Si les évènements qui en firent des réfugies sont encore sujet a polémique, la crise humanitaire qui en découla était bien réelle et méritait une intervention d’urgence.

Cree en décembre 1949 l’UNRWA avait comme mission de pourvoir aux besoins des réfugiés Palestiniens dans l’attente d’une solution. Or celle-ci se limitait à deux options. Soit le retour dans leurs lieux d’origine désormais en Israël, soit leur réinstallation dans les pays Arabes. Israël refusant de les reprendre et les pays Arabes refusant de les réinstaller, la création de l’UNRWA satisfaisait tout le monde. Soixante-dix ans plus tard, ce qui avait été une solution, en principe temporaire, était devenu une partie du problème.

La clé de voute du système UNRWA tient au fait que le statut de réfugié Palestinien s’hérite sans limite de temps selon la ligne patriline. Ainsi, quand le fils d’un réfugié – mais pas la fille- se marie, ses enfants sont des « réfugiés » et cela de génération en génération. Le résultat c’est que si parmi les réfugiées de 1949 seulement quelques 40 000 sont encore en vie, le nombre total de refugies palestiniens comptabilisés par l’UNRWA aujourd’hui se chiffre a environs 5 millions et ne cesse de croitre.

UN AUTOGOAL

Tout comme le refus de reconnaître le plan de partage de la Palestine de 1947, parquer les Palestiniens dans des camps et refuser de les intégrer afin de s’en servir comme instrument de pression contre Israël se révéla pour le monde Arabe un monumental auto-goal. Avec les années les camps devinrent des havres de désespoir et les premiers incubateurs d’un terrorisme qui perdure jusqu’à nos jours.

Après avoir cherché à renverser le gouvernement Jordanien et imposé leur présence au sud-Liban, les palestiniens se retrouvent comme une communauté marginalisée dont les états Arabes se passeraient bien. Une méfiance exacerbée par l’appui Palestinien à Saddam Hussein lorsqu’il envahit le Koweït en 1991 et qui résulta dans l’expulsion de 200 000 palestiniens du Koweït lorsque ce dernier retrouva son indépendance.

Avec les passage des années et la pérennisation de l’implantation Israélienne dans les territoires occupés les rôles ont permuté. A l’origine l’exigence des dirigeants Palestiniens était « un état, partie intégrante de la nation Arabe ». Aujourd’hui le camp de la partition est désormais Arabe et ce sont les extrémistes Israéliens qui s’y opposent. Et suite à la reconnaissance d’Israel non seulement par l’Egypte et la Jordanie mais aussi par les Emirats Arabes et Bahreïn, la « cause palestinienne » ne fait plus recette.

VICTIMES

Si la parenthèse est loin d’être fermée, les dégâts, à ce jour sont considérables et le nombre des victimes de même.

D’abord les Palestiniens ; victimes d’un processus historique qui les dépassaient,, victimes du refus du plan de partage de 1947, victimes du refus de bâtir un état selon la ligne d’armistice de 1949, victimes de leur instrumentalisation par leurs frères Arabes, victimes enfin de leur rêve d’un « retour »illusoire et d’une réalité certes injuste mais qui, tout comme les Allemands des Sudètes, les Français d’Algérie, les Rohingas, les Chinois du Vietnam, les Indiens d’Ouganda pour ne pas dire toutes les communautés Juives Sépharades du monde Arabe, les condamnent à refaire leur vie ailleurs.

QUEL AVENIR ?

Ce refus de voir la réalité amène à deux autres interrogations ;

Premièrement, vue le taux de natalité de la population Arabe, l’annexion de territoires palestiniens par Israël, plutôt que la création d’un Etat palestinien indépendant constitue-t’il une bombe à retardement pour l’état Juif ? De même, considérant la politisation accrue de la société Israelienne entre ultra-orthodoxe qui ne payent pas d’impôts et ne servent pas dans l’armée, expansionnistes fanatiques, laïques et autres, dans quelle mesure la fin potentielle de la menace Arabe priverait le pays du sens de danger partagé qui contribue à son unité ? Avec Hamas qui contrôle Gaza et qui a pour seul objectif l’éradication de l’état Juif ce jour n’est pas prêt d’arriver. Pour le moment, du moins.

C’est dire que dans un monde ou aucun des antagonistes en présence n’as jusqu’á aujourd’hui manqué une occasion de manquer une occasion, le jour ou le scorpion pourra monter sur le dos de la grenouille pour ainsi traverser sereinement le Nile n’est pas pour demain.

Alexandre Casella, diplômé de la Sorbonne, docteur en Sciences Politiques et ancien correspondant de guerre au Vietnam. Il a écrit pour les plus grands quotidiens et a passé 20 au HCR toujours en première ligne de Hanoi a Beirut et de Bangkok à Tirana.

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