Kenya: un plaidoyer pour le camp de réfugiés de Dadaab

Des réfugiés au camp de Dadaab. © DAI KUROKAWA
Des réfugiés au camp de Dadaab. © DAI KUROKAWA

Le Ministre kényan de l’Intérieur, Dr Karanja Kibicho, a exprimé publiquement son inquiétude quant à la faiblesse de la réponse de la communauté internationale à la crise des réfugiés. Médecins sans frontières (MSF) confirme l’insuffisance de cette réponse.

Les doubles standards occidentaux sont inacceptables

Les «doubles standards» de nombreux Etats occidentaux sont inacceptables. Tout en continuant à tourner le dos aux réfugiés fuyant la guerre, l’oppression et le désespoir, ces Etats continuent d’attendre que des pays comme le Kenya accordent leur protection à des centaines de milliers de réfugiés. Cette incohérence est encore plus flagrante quand l’Union européenne signe avec la Turquie un accord qui sous-traite l’accueil des réfugiés à pays susceptible de nier le droit d’asile.

Le gouvernement et le peuple kényans peuvent être fiers d’avoir accueilli des milliers de personnes dans les camps de Dadaab pendant près d’un quart de siècle. Plutôt que d’approuver les politiques aussi défaillantes qu’inhumaines de l’Union Européenne, il est maintenant temps pour le Kenya de réaffirmer et de pérenniser sa tradition d’accueil. Le Kenya pourrait servir d’exemple en ce qui concerne l’accueil des personnes fuyant la guerre et la violence.

Le Kenya a des engagements à tenir

Son gouvernement affirme que Dadaab représente une menace pour la sécurité. Les équipes médicales de MSF ont été les témoins directs des conséquences des actes terroristes ayant visé le Kenya. En avril dernier, nos équipes ont porté secours et assistance aux victimes de l’horrible attaque de l’Université de Garissa, aux côtés du personnel du Ministère de la santé.

Le gouvernement kényan a certes la responsabilité de garantir la sécurité et de protéger sa population. Mais en vertu des conventions internationales sur les réfugiés qu’il a signées, le Kenya a également la responsabilité d’accueillir ceux qui fuient la guerre et les violences.

Il est inacceptable de punir les 325’000 réfugiés de Dadaab pour des actions menées par quelques-uns. Si le conflit en Somalie fait rage depuis plus de 25 ans, les conditions pour un retour digne et en toute sécurité des réfugiés somaliens ne sont aujourd’hui toujours pas réunies. L’accord tripartite (Kenya, Somalie et Haut-Commissariat pour les Réfugiés) pour un retour volontaire signé en 2013 est une bonne chose, mais sa mise en œuvre a été entravée, principalement par l’insécurité en Somalie.

Il faut reconsidérer la décision de fermer les camps

Les camps de Dadaab n’ont jamais été conçus pour accueillir le nombre de personnes qui y vivent aujourd’hui. Ils sont donc surpeuplés et sous-financés. De plus, la proximité de la frontière somalienne les rend encore plus vulnérables à cause de l’insécurité qui règne dans ce pays voisin. Malgré les nombreux appels lancés, il manque une volonté politique de trouver une solution. Des milliers de réfugiés en paient aujourd’hui le prix fort.

Reconsidérer sa décision de fermer les camps serait pour le Kenya l’occasion unique de donner au reste du monde… Une «leçon d’asile». Le Kenya pourrait ainsi montrer son attachement à la dignité humaine et au sort des centaines de milliers de réfugiés poussés dans l’enfer de l’exil par la guerre et les violences.

Liesbeth Aelbrecht est cheffe de mission pour MSF au Kenya.

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