La droite européenne toujours complice de l’évasion fiscale des grandes entreprises

« Profiter du momentum politique créé par les révélations Luxleaks » pour proposer des mesures anti-fraude et évasion fiscale… Voilà ce qu’avait inlassablement répété un député français de l’ex-Union pour un mouvement populaire (UMP) lorsque les pratiques fiscales douteuses du Luxembourg ont été révélées. « L’évasion fiscale, c’est scandaleux et il faut y mettre fin ! » a récemment déclaré un autre…

Avec les directives sur les droits des actionnaires et sur le secret des affaires, le moment est venu, au Parlement européen, de mettre en pratique cette volonté politique. Mais c’est compter sans l’hypocrisie de la droite européenne, si prompte à s’indigner dans les médias des pratiques contestables et condamnables des grandes entreprises mais toujours constante quand il s’agit d’encourager ces comportements en leur assurant une base légale.

Le rapport sur la directive sur les droits des actionnaires d’abord, propose de véritables mesures de transparence, comme on en voit rarement dans un Parlement dominé par la droite. Notamment le « Say on Pay » (la possibilité pour les actionnaires de se prononcer sur la rémunération des administrateurs) ; et le reporting pays par pays (l’obligation pour l’entreprise de publier les activités de ses filiales, séparées par pays) qui permet de détecter les manœuvres d’optimisation fiscale.

Les grandes sociétés remportent

Il faut dire que ces mesures ont été adoptées en commission des affaires juridiques contre l’avis de la droite européenne. N’étant pas parvenu à faire échec aux avancées nécessaires en matière de transparence fiscale, mauvais perdant, le Parti populaire européen (PPE), où siègent les députés de l’ex-UMP, a usé de ficelles procédurales contestables pour renvoyer ce rapport à un vote en plénière où il se sait plus facilement majoritaire pour remettre en cause ces dispositions.

N’oublions pas que c’est cette même droite européenne, qui soumet d’un côté les petites entreprises, premières créatrices d’emplois, et les classes moyennes et modestes à des mesures d’austérité insoutenables, et d’un autre permet aux grandes sociétés de détourner des milliards en ne payant pas d’impôts. À ce niveau, ce n’est plus de la mauvaise volonté, mais de la complicité !

Et voilà qu’après s’être tant assuré que ceux qui avaient peu aient encore moins, et ceux qui ont beaucoup continuent d’avoir plus, elle souhaite également protéger les entreprises aux pratiques douteuses en voulant entraver la liberté de dénoncer de tels agissements aux autorités compétentes et de les révéler aux yeux de tous.

Pour la transparence

Lors des révélations « Luxleaks » sur l’évasion fiscale des multinationales, les députés du PPE ont feint de vouloir défendre les lanceurs d’alerte, accueillis par le président de la commission spéciale sur l’évasion fiscale – PPE également – à grand renfort de compliments sur leur rôle déterminant pour la démocratie. Mais il suffit de lire leurs amendements sur la Directive sur le secret des affaires pour déceler leurs véritables intentions : faire peser une menace insupportable sur tous ceux – journalistes, lanceurs d’alerte, salariés, citoyens – qui s’engagent pour défendre l’intérêt général et la démocratie.

A l’opposé, les Socialistes et Démocrates européens se mobilisent pour protéger et renforcer la liberté d’expression et faire de ce texte un rempart pour tous ceux qui n’hésitent pas à prendre des risques pour enquêter, dénoncer, informer. La protection des journalistes et de leurs sources est une nécessité absolue. Il en va de même pour les révélations d’atteintes à l’intérêt public par les lanceurs d’alerte.

Je rappelle à mes collègues députés PPE, notamment aux Français de l’ex-UMP, à quel point ils se sont indignés lors de la révélation du « Luxleaks », et à quel point les pratiques d’optimisation fiscale semblaient leur faire horreur. Je les appelle en conséquence à soutenir ces mesures de transparence qui permettraient un contrôle renforcé des pratiques fiscales des entreprises.

Il ne s’agit pas ici d’idéologie, mais tout simplement de cohérence ! Ce sont les citoyens européens qui nous ont élus. Ce sont leurs intérêts que nous représentons. Pas ceux des multinationales et des champions de l’évasion fiscale.

Virginie Rozière est une député européenne, socialiste et démocrate (S&D) du Sud-ouest

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