L’adoption d’une cryptomonnaie permettrait la renaissance d’un système d’étalon-or

Comme les FinTech, et de façon générale les robots et l’intelligence artificielle, la cryptomonnaie suscite un engouement sans précédent qui justifie que l’on s’interroge sur les fondements de ce succès.

Exactement comme dans les années 1960 au moment de la naissance de la grande ère de l’informatique, la cryptomonnaie part d’un bon principe de justice et de progrès. Car les années 1960 ont été le prélude à une formidable histoire : celle des technophiles. De l’économie à la médecine, on pensait tout résoudre par les technologies. Ce progrès fut symbolisé par « la baie de San Fransisco », lieu mythique de création. C’est ici que naquit la culture entrepreneuriale et les premières start-up informatiques.

Les hippies étaient technophiles et rêvaient de progrès au travers des technologies, solutions aux excès du consumérisme et aux inégalités croissantes. « Beat generation », activistes, « whole earth », tous croyaient en la maîtrise de l’homme sur la machine, mais dans un but social en opposition au pouvoir central considéré comme bureaucratique et injuste.

Conséquence de l’exclusion économique

Pourtant, après de longues années de progrès à la gloire des « trente glorieuses », l’informatique est devenue depuis les années 1980 et le développement des systèmes experts puis de l’intelligence artificielle une technologie « exclusive », jugée en partie responsable de la croissance des inégalités de richesse que l’on observe depuis les années 1980.

C’est aussi dans ce sens qu’il faut réfléchir aux motivations de l’émergence de la cryptomonnaie, cette monnaie étalon qui fait un peu penser à une monnaie convertible comme l’étalon-or des années 1960, à ceci près qu’elle est électronique et davantage inclusive.

Prenons l’exemple du bitcoin, la plus connue des cryptomonnaies. Il faut savoir en effet que le bitcoin a trouvé ses origines dans ce que les Américains appellent le « cash ghetto ». D’un côté les pauvres utilisent du cash, de l’autre les classes économiques supérieures font des virements et utilisent des moyens de paiement sécurisés que les banques contrôlent. Le bitcoin est né d’une volonté d’utiliser des moyens de paiement sécurisés pour tous, pour pouvoir financer des dépenses de faibles montants.

De plus, le bitcoin est la conséquence de l’exclusion économique et financière de franges de la population. Dans bon nombre de pays en voie de développement, il y a d’abord un fort rejet du pouvoir monétaire central – par exemple à l’égard du franc CFA en Afrique de l’ouest. A cela s’ajoute ce que l’on appelle la « hidden tax », c’est-à-dire l’inflation créée par des politiques monétaires inflationnistes qui visent à dévaluer les devises afin de financer les dépenses publiques, mais qui détruit le pouvoir d’achat d’une part importante de la population.

138 milliards de dollars

C’est pour cette raison que bon nombre de pays comme le Venezuela et le Zimbabwe réfléchissent à légaliser le bitcoin, emboîtant d’ailleurs le pas au Canada et… aux Etats-Unis. Si l’on devait prendre des exemples européens, on pourrait dire que le « run deposit », c’est-à-dire la course au guichet bancaire au moment de la grave crise de la dette publique grecque, ou même la taxation de l’épargne au moment de la crise chypriote, n’auraient pas eu lieu avec une sorte « d’étalon-bitcoin » en zone euro, c’est-à-dire une politique monétaire électronique.

Le plan B proposé par le ministre de l’économie grec Yanis Varoufakis lors de la crise grecque était précisément de remplacer l’euro par une cryptomonnaie électronique. Aujourd’hui, la valeur de marché estimée du bitcoin est de 138 milliards de dollars.

Car la cryptomonnaie, grâce à sa colonne vertébrale, la blockchain sécurisée et informatisée par des algorithmes, permet par exemple de maîtriser en temps réel l’inflation. Elle peut révolutionner la politique monétaire des banques centrales.

Certes, certains ajouteront que les cryptomonnaies sont le résultat d’une pensée libertarienne et un peu anarchiste, et qu’elles soulèvent forcément quelques zones d’ombre. Mais avant de se forger une opinion, il faut bien évaluer les deux faces de la pièce. D’après les autorités des marchés financiers, le premier risque des cryptomonnaies est l’arnaque. Viennent ensuite le piratage et le caractère illicite de certaines transactions.

Stabilité des monnaies et plus grande justice

Il faut ajouter la volatilité exceptionnelle de certaines de ces monnaies comme le bitcoin : la chute peut être aussi vertigineuse que la montée. L’usage d’une monnaie électronique exige la garantie des dépôts et une régulation des autorités monétaires. Moyennant quoi les cryptomonnaies pourraient constituer une véritable révolution pour la politique monétaire.

Certes, la « real time regulation », c’est-à-dire le fait de réguler une activité en temps réel à l’ère de l’internet, doit se focaliser d’abord sur la lutte contre le blanchiment d’argent, comme le propose la Securities & Exchange Commission (SEC, l’autorité de régulation des marchés financiers) aux Etats-Unis. C’est aussi le sens de la 4e directive anti-blanchiment en Europe.

Mais l’adoption d’une cryptomonnaie ne signifierait pas la fin de la monnaie centrale, au contraire : elle permettrait la renaissance d’un système d’étalon-or qui, grâce à la sécurité de la blockchain et la puissance de l’électronique élimineraient, en collaboration avec les autorités centrales, les méfaits de l’étalon-or, dénoncés en 1971 par Richard Nixon. La fin de l’étalon-or était en effet liée aux demandes faramineuses de conversion du dollar dues aux incertitudes sur l’économie réelle américaine et son niveau d’inflation.

Moyennant un encadrement juridique rigoureux des autorités de tutelle et, avec le consentement des banques, la cryptomonnaie peut être un outil moderne au service de la politique monétaire, qui ferait émerger le principe de l’étalon-or sans ses défauts pour une stabilité des monnaies et une plus grande justice à l’échelle mondiale…

Pascal de Lima, Chef économiste de Harwell Management.

1 comentario


  1. Article très intéressant. Je suis d’accord sur le fait que l’adoption d’une crypto monnaie permettrait la renaissance d’un système d’étalon-or. La devise digitale idéale serait le bitcoin. Malgré son côté volatil, cette monnaie numérique attire de plus en plus d’investisseurs. Raison pour laquelle de nombreux pays veulent le légaliser. J’ai fais un placement financier sur le bitcoin il y a de cela plusieurs sur le site btimarket donc je suis satisfait de bénéfices générés. Quoique, ces devises n’élimineront pas les monnaies fiat.

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