Le droit à l’euro doit être un principe fondamental

Le nouvel épisode vexatoire dans lequel l’Eurogroupe s’est engagé le 14 décembre dernier ranime les tensions autour de la Grèce. Après que le pays a dépassé cette année les objectifs fixés par ses créanciers en matière d’excédent budgétaire, le gouvernement d’Alexis Tsipras avait décidé en effet de donner une bulle d’oxygène aux Grecs les plus atteints par l’austérité avec une prime de Noël pour les retraités les plus pauvres et le report de la hausse de la TVA sur les îles de la mer Egée touchées par la crise migratoire. En réponse, l’Eurogroupe a suspendu ses maigres engagements récents d’allégement de la dette publique grecque.

Difficile de ne pas y voir la main de Wolfang Schäuble, le tout puissant ministre des Finances d’Angela Merkel. Il semble ici poursuivre son plan machiavélique : pousser la Grèce et les pays d’Europe du Sud hors de l’euro. Comme il n’est pas possible d’exclure un pays de la zone, il espère sans doute que l’étouffement politique du gouvernement Tsipras parviendra à rendre le choix d’être dans l’euro tellement insupportable aux Grecs qu’eux-mêmes demanderont à en sortir.

Pourtant Alexis Tsipras et le peuple grec ont montré depuis l’été 2015 combien leur adhésion à l’euro était profonde et qu’ils étaient prêts à beaucoup de sacrifices pour conserver la monnaie unique. Et c’est peu de le dire : la pauvreté a explosé en Grèce, le système de santé est à l’agonie, le chômage touche près d’un quart de la population et près de la moitié des jeunes tandis que les migrants continuent d’affluer…

Beaucoup de sacrifices

C’est pourquoi il était parfaitement légitime de profiter des bons résultats budgétaires pour relâcher un peu la pression et envoyer un signe aux plus nécessiteux. La popularité d’Alexis Tsipras a beaucoup reculé et ces vexations pourraient avoir des conséquences politiques graves : les membres de l’Eurogroupe ne peuvent ignorer ce contexte et leur décision est inexcusable.

Pour sortir de ce cycle infernal et empêcher que les lubies de quelques-uns ne se transforment en désastre pour l’Europe, il est nécessaire d’affirmer un principe fondamental : le droit à l’euro. Les citoyens de chacun des Etats, membres de la zone euro doivent avoir la garantie que l’euro restera bien leur monnaie quelles que soient les circonstances. Ils ne doivent pas devenir l’otage des plus forts dans ce qui constitue un élément primordial de leur vie économique et sociale.

Que ce droit soit associé à des devoirs, que l’on prenne des dispositions pour empêcher qu’un Etat ne se comporte en passager clandestin de la monnaie unique est bien entendu légitime. Mais en élevant l’accès à la monnaie unique au niveau d’un droit imprescriptible, on permettrait aux citoyens européens de contester les décisions du tout puissant Eurogroupe et on ouvrirait un espace de démocratie par un contre-pouvoir essentiel. Un contre-pouvoir qu’un parlement de la zone euro permettrait de garantir et de concrétiser. Pour survivre au XXIe siècle la monnaie unique doit devenir un outil de solidarité : l’Euro doit se renforcer par la démocratie et cesser de se construire contre elle.

Yannick Jadot, erodéputé, candidat des écologistes à l'élection présidentielle.

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