Les manifestants marocains veulent une réforme de la constitution

Au Maroc des voix s'élèvent pour appeler à des manifestations pacifiques le 20 février. J'apporté mon soutien à ce mouvement pacifique, parce que je pense que c'est la seule voie qui nous reste pour réclamer les réformes à même de répondre aux maux dont notre pays souffre.

Le Maroc à bien sûr ses caractères propres et il est nécessaires d'en tenir compte pour ne pas confondre sa situation avec celles de la Tunisie, de l'Egypte et des autres pays "frères". Mais il faut bien constater que les réalités de ce pays contredisent les discours lénifiants que certains milieux marocains et non-marocains tentent de faire accréditer dans l'opinion publique. On pourrait citer une longue liste de problèmes. Parmi eux : une pauvreté rampante dans de très larges couches de la population, l'absence d'emploi pour un cinquième (ou un quart ?) de la population jeune en âge de travailler, l'énorme proportion des illettrés après plus d'un demi-siècle d'indépendance, le chômage et la démoralisation des diplômes, et le manque de perspectives pour la masse des scolarisés et des jeunes, enfin les inégalités exceptionnellement fortes et choquantes entre riches et pauvres. Je m'en tiendrai là pour ne pas lasser les lecteurs.

Les voix qui s'élèvent pour réclamer pacifiquement, mais de façon décisive, les réformes indispensables, le font aujourd'hui parce qu'elles ont perdu espoir dans la capacité du régime marocain, tel qu'il est actuellement, à trouver les solutions adéquates a ces problèmes. Raison essentielle : l'absence de démocratie véritable, avec un parlement et des assemblées élus dans la transparence et les garanties légales nécessaires. La racine de cette carence se trouve dans une constitution imposée, qui refuse l'essentiel des pouvoirs au peuple pour les concentrer entre les mains de l'institution monarchique.

Sans ce développement proprement politique, il n'y a pas de développement économique capable de générer la prospérité, l'emploi et une redistribution qui réponde aux besoins et droits humains de la majorité, une redistribution équitable. Or force est de constater qu'au Maroc, les quelques libertés acquises tournent à vide par le fait que les Marocains n'ont pas accès à la décision en ce qui concerne les politiques qui déterminent leur vie quotidienne et leur futur. Les portes sont ouvertes uniquement à ceux qui cherchent les bénéfices d'une situation verrouillée et font la promotion de politiques décidées par un régime opaque, dotés de nouveaux moyens de contrainte et d'un système de propagande révolu.

POUR UNE MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE VÉRITABLE

Les Marocains qui appellent à la manifestation veulent une reforme de la constitution, qui garantisse la séparation des pouvoirs et une définition claire des prérogatives de la monarchie d'une part, des assemblées, parlements et corps élus de l'autre. Cela veut dire une monarchie qui règne et des gouvernements issus de majorités qui ont le pouvoir de gouverner. Un pouvoir découlant des voix exprimées par des élections dont la propreté est garantie par loi, et surveillées par les parties en compétition.

Pour ceux qui ne le savent pas, je me permets de rappeler que la revendication d'une monarchie constitutionnelle véritable est très ancienne. Elle a été fortement renouvelée par les militants de l'independance, et depuis toujours par les forces vives de la nation. La démocratie, dans le cadre d'une vraie monarchie constitutionnelle, telle est la question de l'heure au Maroc.

Par Abdellah Hammoudi, professeur d'anthropologie à l'Université de Princeton.

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