Libye : les questions qui doivent être posées sans tarder

L'intervention des troupes françaises en Libye nécessite un réel débat sur les motivations, les objectifs et les risques de l'engagement militaire de la France.

Si l'opération se justifie moralement (la défense de la population libyenne face à l'écrasement dans le sang de l'opposition par Kadhafi) et politiquement (le soutien aux démocrates arabes), sa légitimité n'apparaît pas bien assurée.

La résolution 1973 votée par le Conseil de sécurité, qui autorise les opérations militaires en Libye, comporte de nombreuses ambiguïtés, et n'empêchera donc pas l'effritement du soutien de la communauté internationale : aujourd'hui la Ligue arabe, l'Union africaine et la Russie s'opposent aux opérations engagées ; demain la Chine et sans doute d'autres pays émergents suivront.

L'engagement d'une guerre, même avec l'aval des Nations Unies, nécessite l'examen minutieux des objectifs, des différents scénarios possibles, et d'une stratégie de sortie. Le scénario vertueux prévoyant la chute rapide de Kadhafi, défait par l'opposition, est loin d'être le seul envisageable. L'enlisement du conflit et l'effritement du soutien de la communauté internationale font craindre une partition du pays, laissant Kadhafi jouer le rôle du résistant à l'invasion occidentale. Autant d'incertitudes qui expliquent la prudence de l'engagement américain, et obligent la France à préciser sa stratégie au plus vite.

La fragile légitimité de l'opération tient également aux valeurs humanistes qui la sous-tendent : salies lors de la guerre irakienne, elles sont loin d'entraîner l'adhésion de l'opinion publique arabe, ou plus largement des pays du Sud, qui voient dans l'opération en Libye un coup de force occidental. Cette intervention pourra-t-elle par ailleurs faire oublier les errements de la politique étrangère française face au printemps des peuples arabes, quand l'écrasement des révoltes bahreïni et yéménites ne donne lieu à aucune réaction de la France ? L'opération en Libye ne saurait masquer les incohérences de la politique française en Méditerranée, et la stratégie de la France en matière de ventes d'armes.

L'annonce unilatérale, par Nicolas Sarkozy, de la reconnaissance de l'opposition libyenne, avant même le vote du Conseil de sécurité, et alors qu'Alain Juppé négociait avec les partenaires européens une position commune constitue une prise de risque inutile, et pose le problème, persistant, de la méthode de gouvernement.

Enfin, l'absence de l'Union européenne dans la gestion de la crise libyenne signe l'échec de la construction d'une Europe de la défense ambitieuse, qui ne peut se limiter à la coopération franco-britannique.


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Henry Olivier, Terra Nova.

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