L’or, la pierre, la cryptomonnaie… Quelle sera la bulle de 2018 ?

Pour le particulier, depuis presque vingt ans déjà, la pierre est le meilleur moyen d’augmenter sa richesse, l’immobilier progressant trois fois plus vite que les salaires. Après deux années exceptionnelles, le volume des transactions s’est emballé, entraînant dans son sillon une part importante de primo-accédants. Réalité ou illusion ? C’est confirmé, la bulle immobilière n’est pas loin d’éclater, même si les prix continuent de grimper sur certains segments où la confiance des investisseurs n’est pas ébranlée (par exemple Paris, qui bénéficie de l’impact du Brexit, ou Bordeaux, qui profite de l’effet TGV).

Sans mesures incitatives, l’écart entre la valeur des biens et le pouvoir d’achat se creuse, en rallongeant la durée des prêts empruntés. De leur côté, l’encadrement des loyers et la pression fiscale menacent les propriétaires bailleurs et ouvrent aux primo-accédants l’opportunité de bénéficier d’une remise sur le marché d’un nouveau parc de biens qui compense en partie la hausse de l’immobilier.

Mais les mesures du gouvernement tendent toutes à freiner ce pouvoir attractif de la pierre.

Si l’immobilier crée de la valeur, un prêt accordé déclenche aussi un dépôt qui s’ajoute à la masse monétaire de la banque créditrice. Or, la Banque centrale européenne s’efforce de réguler les marchés. Les banques, de leur côté, répondent à des logiques de chiffre d’affaires et de volume. Elles devront également faire face à l’amendement Bourquin, qui ouvre leur encours d’assurances de prêt à la concurrence. La hausse de l’immobilier pourrait être ainsi pondérée, mais ponctuée d’actions commerciales agressives en fonction de la variation de la courbe des taux.

Un cycle de déflation à attendre

Sous couvert de valoriser la valeur du travail et de gommer des inégalités sociales, les mesures fiscales du gouvernement sanctionnent les propriétaires, soit… 58 % des Français qui sont propriétaires de leur résidence principale, avec le recentrage des aides incitatives, par la hausse des prélèvements sociaux pour le locatif, avec le nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI)… De plus, il sera intéressant de comparer la courbe de la taxe foncière (qui subit déjà depuis trois ans une forte hausse) avec celle de la suppression progressive de la taxe d’habitation…

On peut aussi voir les choses différemment. Car ces mesures pourraient aussi contrer l’effet dévastateur d’une éventuelle crise immobilière. L’argent qui n’est pas affecté au placement immobilier peut être réinjecté pour doper l’économie réelle et les placements sur les valeurs mobilières (actions, obligations, assurance-vie…). On peut ainsi lire dans les politiques du gouvernement et de la Banque centrale une action combinée pour réguler le marché et tenter d’éviter une nouvelle crise économique.

Mais si la bulle immobilière explose rapidement, les emprunteurs vont être amenés à rembourser leur prêt plus cher que la valeur de leur bien. Qu’en sera-t-il de leur solvabilité et des conséquences sur les banques ? Par ailleurs, la pyramide des âges des propriétaires laisse également entrevoir que, d’ici dix à vingt ans, à leur décès, une grande partie du parc immobilier va être remise sur le marché. Crise ou pas crise, on sait qu’à terme, l’immobilier va rentrer dans un cycle de déflation.

Actif capricieux mais performant

Le modèle financier repose aujourd’hui sur le rôle des banques dans la création monétaire, et sur l’influence de la Banque centrale en matière de prix (taux) et de quantité (facilité quantitative) de la liquidité monétaire.

Mais avec la cryptomonnaie, nouvelle valeur de troc, nous sortons du système conventionnel. Des flux monétaires de paiement, de prêt, d’emprunt et d’investissement se développent en dehors du système bancaire, ce qui fragilise l’impact de la banque centrale sur l’économie réelle. Dans certains pays, comme le Canada (CAD-coin) et la Suède (Ekrona), les banques centrales ont compris ces enjeux et s’essayent déjà à en réguler l’émission et l’usage.

La cryptomonnaie est un actif certes capricieux, mais qui a déjà prouvé sa performance. Citons la crise chypriote de 2013 : perdant confiance envers les banques et voyant leurs dépôts taxés, les particuliers se sont tournés spontanément vers le Bitcoin. L’équilibre bancaire actuel peut être vite fragilisé.

Hégémonie du dollar

D’autres placements tels que l’or, actif sans rendement mais valeur refuge, suscitent une certaine ruée. L’Allemagne a rapatrié une grande partie de ses stocks situés notamment en France et aux Etats-Unis ; en 2016, les particuliers allemands sont devenus les premiers investisseurs en or au monde, ce qui est révélateur de leur défiance envers l’euro.

La Chine, premier producteur d’or, réinvestit le produit de ses ventes dans son économie et resserre ses partenariats avec la Russie (échanges en yuans et roubles russes). La Russie accroît ses réserves d’or à un rythme de plus en plus soutenu depuis les sanctions américaines et européennes de mars 2014, consécutives à l’annexion de la Crimée.

La volonté de rompre avec l’hégémonie du dollar américain est sans ambiguïté. Dans un contexte de tensions géopolitiques, l’or est un rempart pour se prémunir d’une éventuelle dévaluation des différentes monnaies internationales.

La guerre économique va reposer de plus en plus sur cette pression sur le marché de l’or et sur le contre-pouvoir des cryptomonnaies. L’économie mondiale pourrait ainsi voir gonfler ces deux nouvelles bulles explosives, qu’il devient urgent de réguler. L’or, la pierre, la cryptomonnaie, quelle sera la bulle de 2018 ?

Par Karl Sivignon, Fondateur d’Arturo-credit.com, plate-forme de services financiers dans l’assurance et le crédit immobilier.

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