L'OTAN a besoin d'une défense antimissile

A Lisbonne, les 19 et 20 novembre, les dirigeants des pays de l'OTAN se réuniront pour décider si l'Alliance doit bâtir une défense antimissile pour l'Europe. Ils prendront cette décision importante en fonction des réponses à certaines questions essentielles.

Existe-t-il une menace ?

En un mot : oui. Les missiles représentent une menace grandissante pour nos populations, notre territoire et nos forces déployées. Plus d'une trentaine de pays possèdent ou acquièrent actuellement des missiles qui pourraient être utilisés pour emporter non seulement des charges conventionnelles, mais aussi des armes de destruction massive. Certains de ces missiles sont déjà en mesure d'atteindre des villes européennes, et le problème va s'aggraver.

La prolifération ne signifie pas forcément qu'il existe une intention immédiate de nous attaquer. Elle implique bien, en revanche, que nous avons la responsabilité de protéger nos populations. Nous ne pouvons pas nous permettre de voir ne serait-ce qu'une de nos villes touchée. Et nous ne pouvons pas non plus nous permettre d'être pris en otage par la menace d'une attaque.

La défense antimissile fonctionnera-t-elle ?

Bâtir une défense antimissile efficace constitue un défi réalisable. Nous pouvons, à présent, mettre en service des systèmes éprouvés qui ont été testés avec succès. De plus, l'OTAN possède une longue expérience du développement et de la mise en oeuvre de systèmes intégrés de défense aérienne. Nous travaillons déjà à la mise en place d'une défense antimissile pour la protection de nos troupes déployées en opérations.

En élargissant ce programme et en le liant aux systèmes de défense antimissile des Etats-Unis, l'OTAN serait en mesure de défendre les populations et le territoire des pays alliés européens contre les attaques de missiles.

Combien cela va-t-il coûter ?

La défense antimissile ne sera pas bon marché, mais elle ne nous mènera pas pour autant à la banqueroute. L'actuel programme OTAN, visant à constituer un système de défense antimissile pour les troupes déployées en opérations, représente un coût de 800 millions d'euros, répartis sur quatorze ans entre tous les alliés. Pour moins de 200 millions d'euros supplémentaires, prélevés sur notre budget commun et répartis sur dix ans, ce programme pourrait être étendu de manière à permettre à l'OTAN d'assurer la défense des populations et du territoire de l'Europe.

En période de restrictions budgétaires, il s'agit de moyens de défense importants à un coût abordable. A partir d'un investissement relativement peu élevé, tous les alliés pourraient ainsi se connecter au système à plusieurs milliards de dollars des Etats-Unis, partager les avantages que procure une sécurité renforcée, et témoigner d'un engagement commun envers notre défense mutuelle.

Quels sont les avantages ?

En termes militaires, un système intégré de défense antimissile offrirait une capacité globale bien plus importante que celle des systèmes nationaux individuels. En partageant des données dans l'ensemble du système, nous disposerions d'une image globale de notre situation aérienne. En raccordant les systèmes, nous aurions de multiples possibilités coordonnées d'arrêter un missile entrant dans notre espace aérien, bien davantage que si les pays eux-mêmes assumaient cette responsabilité.

Les avantages politiques sont tout aussi importants. La mise en place de ce système montrerait clairement la solidarité et le partage des charges entre les alliés face à une menace commune, et offrirait des possibilités de coopération véritable avec la Russie. La coopération OTAN-Russie en matière de défense antimissile permettrait, une fois pour toutes, d'ouvrir véritablement la porte d'une nouvelle ère de coopération sous la protection d'un dispositif euro-atlantique commun de sécurité. Nous devons protéger nos populations et notre territoire contre la menace posée par la prolifération des missiles. L'OTAN est en mesure de le faire, à un coût abordable.

Le sommet de Lisbonne devrait nous donner l'occasion de prendre la décision de nous doter des capacités qui nous permettront de protéger nos populations et notre territoire - et, dans le même temps, d'inviter la Russie à coopérer avec nous et à partager les avantages de ce système.

Anders Fogh Rasmussen, secrétaire général de l'OTAN.