Mugabe, l'anti-Confucius

Le président du Zimbabwe Robert Mugabe, 92 ans, 35 ans au pouvoir – l’indépendance était en 1980 – a reçu récemment le prix Confucius de la Paix (créé en 2010), un pendant du Prix Nobel de la Paix, «pour sa contribution exceptionnelle à la Paix mondiale». Les réactions outrées d’ONG et d’autres personnalités de l’opposition au Zimbabwe et ailleurs dans le monde n’ont pas manqué. De l’avis de Gordon Mayo, secrétaire général du Parti démocratique populaire du Zimbabwe: «Mugabe, tel que nous le connaissons et tel que nous en avons fait l’expérience, est un va-t-en guerre et un sadique qui se délecte de la misère de son peuple.» Il a reçu en outre 500 000 yuans (69 000 euros) d’un homme d’affaire chinois. En effet, au Zimbabwe la monnaie chinoise doit remplacer le dollar zimbabwéen et pourra bientôt être utilisée aux côtés du dollar et de l’euro. De plus on estime à environ 1,5 million le nombre de Chinois qui se sont établis ces dernières années et y travaillent alors que des milliers de jeunes Africains sont sans travail et cherchent à émigrer en Europe… Une honte!

Une attribution dans la ligne de la politique chinoise en Afrique

Comment comprendre cette attribution? Elle est parfaitement dans la ligne de la politique chinoise en Afrique, qui cherche à court-circuiter toute influence occidentale dans le continent et à la remplacer selon son idéologie. Des chefs d’Etats, des ministres ou autres cadres sont envoyés à Pékin pour apprendre la «bonne gouvernance». Les droits de l’homme ne sont pas prioritaires, la liberté de la presse non plus.

Robert Mugabe est l’exemple type, admiré encore aujourd’hui, du leader qui a «osé chasser les Blancs» de son pays, même si cela a provoqué la famine et l’effondrement économique. Il a ainsi été élu président de l’Union africaine en janvier 2015, ceci probablement aussi sous pression de la présidente de la Commission, la Sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma. D’ailleurs, on observe actuellement que les présidents de plusieurs pays africains veulent changer leur constitution, généralement d’obédience juridique occidentale, pour effectuer un troisième mandat ou même plus, ce qui provoque les conflits civils que nous observons. Mugabe lui-même a été réélu en juillet 2013 grâce à «l’aide» d’une firme israélienne, Nikuv International Projects, sans doute en récompense des diamants de la région de Marangue d’où il avait chassé manu militari les petits producteurs, voire même les tuant.

Qu’en penserait Confucius?

Et dire que Confucius (551-479 av. J.-C.) est enseigné dans des universités africaines, notamment en Namibie! Que penserait le célèbre philosophe et sage chinois qui a dit notamment: «Trois sortes d’amis sont utiles, trois sortes sont néfastes. L’ami utile est droit, fidèle, cultivé. L’ami néfaste est faux, mou, bavard.» On a l’impression que la Chine, comme Daech mais d’une manière bien plus subtile et pacifique, veut «débarrasser» l’Afrique de l’influence occidentale et la remplacer par sa propre idéologie politique, économique et culturelle. Reste à savoir si tous les Africains seront d’accord…

Christine von Garnier, docteur en sociologie et journaliste sur l'évolution socio-économique et humaine en Namibie de 1986 - 2009.

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