Permettre un nouveau départ à la Grèce

Le nouveau gouvernement grec a joué son va-tout en déclarant unilatéralement qu’il ne respecterait pas l’accord conclu entre son précédesseur et les créanciers du pays, et qu’il augmenterait les dépenses publiques tout en maintenant son insolvabilité.

La réponse était prévisible : le reste de la zone euro, notamment la Banque centrale européenne (BCE) et l’Allemagne, ont eu l’impression de faire l’objet d’un chantage et ont mis la Grèce au défi. La BCE a rendu l’accès à ses liquidités plus difficile pour les banques grecques ; Berlin a déclaré qu’une sortie de la Grèce de la zone euro pouvait être gérable.

Cette réponse est nécessaire, mais insuffisante. Nécessaire, car le système monétaire ne saurait être crédible si un pays membre peut le prendre en otage en décidant d’augmenter ses dépenses aux frais des autres membres, tout en espérant recevoir des financements de la BCE. Un pays ne saurait davantage répudier des accords conclus entre un gouvernement précédent et ses partenaires.

Lutte contre l’évasion fiscale et la corruption

Mais cette réponse est insuffisante, car le nouveau gouvernement grec a été élu en recevant un appui très solide pour changer de cap aussi bien dans la politique économique intérieure que dans les relations avec ses partenaires. Ne pas en tenir compte n’est pas envisageable. Les Grecs ont besoin d’une perspective réaliste d’améliorer leur vie quotidienne.

Mais cette perspective ne saurait résulter d’un chantage ; elle doit découler d’une action sérieuse sur le plan national, et d’un accord entre les partenaires de l’Eurogroupe. Quels seraient les éléments d’un tel accord ?

Premièrement, Athènes doit tenir ses promesses de résolution des problèmes internes. Comme l’a dit Yanis Varoufakis, le nouveau ministre grec des finances, la lutte contre l’évasion fiscale et la corruption est essentielle, et le gouvernement précédent ne l’a pas suffisamment considérée comme une priorité. Un plan concret et sa mise en œuvre effective contribueraient considérablement au renforcement de la crédibilité du nouveau gouvernement, en Grèce et à l’étranger.

Détresse sociale

Deuxièmement, il faut répondre aux besoins de financement de la Grèce dans les mois à venir. Sinon, elle ne pourra ni rembourser sa dette au Fonds monétaire international et à la BCE en temps et en heure, ni couvrir toutes ses dépenses. Pour bénéficier d’un financement européen, elle devra satisfaire aux conditions posées, mais celles-ci pourraient être remplies sans passer par la « troïka », rejetée par le nouveau gouvernement.

Troisièmement, il faut revoir le niveau d’excédent primaire exigé. Trop bas, il ferait augmenter la charge supportée par les contribuables étrangers ; supérieur à 4 %, il s’avérerait irréaliste. La situation sociale est épouvantable dans certaines parties de la Grèce, ainsi que dans d’autres pays en crise. L’UE pourrait convenir d’un programme destiné à atténuer la détresse sociale là où cela s’avère nécessaire.

Quatrièmement, il faut diminuer le poids de la dette. Actuellement, les intérêts payés par Athènes sont faibles, comparables à ceux de l’Allemagne ou de la France (respectivement 2 %, 1,8 % et 2,3 % du PIB), grâce au répit de huit ans que ses créanciers lui ont accordé. Il n’est donc pas envisageable de réduire le poids de la dette sur le budget actuel.

En revanche, il est possible de lever l’incertitude sur les remboursements futurs. Si la Grèce surmonte ses faiblesses structurelles, la croissance pourrait reprendre et le ratio dette/PIB (aujourd’hui de 125%) diminuer. Mais la croissance peut tout aussi bien être faible. Or, les investisseurs boudent les pays à la solvabilité incertaine. Une solution pour lever l’incertitude serait d’indexer les prêts sur l’évolution du PIB.

Un accord est encore envisageable, mais c’est à la Grèce de faire le plus gros effort.

Guntram B. Wolff , Institut Bruegel, Bruxelles.

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