Pourquoi le Chili entre dans l’OCDE

Aujourd’hui, lors d’une cérémonie officielle à Santiago, le Chili signera l’accord grâce auquel il deviendra le 31e pays membre de l’OCDE et son premier membre en Amérique du Sud. Pour le Chili, cette adhésion représente la reconnaissance de près de vingt années de réformes démocratiques et de politiques économiques judicieuses. Pour l’OCDE, elle marque un pas important dans sa mission de bâtir une économie mondiale plus forte, plus saine et plus juste.

Le Chili a fait de gros efforts pour atteindre cet objectif. En l’espace d’un peu moins de trois ans, il a introduit de nouvelles lois et changé ses pratiques dans beaucoup de domaines afin de répondre aux exigences de l’OCDE. Dorénavant, en tant que membre de l’organisation, il sera au cœur de l’élaboration et de la mise en œuvre des règles qui façonneront, à l’échelle mondiale, l’économie et la société de demain.

Les membres de l’OCDE forment un cercle de pays voués à l’application des normes les plus élevées et des pratiques les plus efficaces en matière économique. Ensemble, ils recherchent des solutions à des défis d’envergure mondiale, allant des choix de politique économique aux moyens de lutter contre le changement climatique. De la sorte, ils aspirent à fournir à leurs citoyens les meilleures opportunités possible en matière d’éducation, de santé publique et d’emploi, et à aider les autres pays à œuvrer en ce sens.

Alors que nous nous employons à sortir de la crise, il est clair que les économies émergentes, en développement et avancées se doivent de travailler main dans la main. Grâce aux nouvelles technologies et à la mondialisation, de nouveaux pays et régions émergent sur la scène internationale. De nouveaux défis se font sentir, qu’il s’agisse de gérer les flux migratoires, de concevoir un système d’échanges équitable et ouvert ou encore de lutter contre la fraude fiscale. Dans une économie mondialement interconnectée, aucun pays ne pourra relever seul de tels défis. Divisés, nous sommes faibles. Unis, nous pourrons avancer.

L’expérience de mon propre pays, le Mexique, qui a rejoint l’OCDE en 1994, démontre la valeur de cette collaboration multilatérale. Au cours de ces seize dernières années, le Mexique a grandement tiré parti des conseils et recommandations de l’OCDE. Dans le même temps, par ses réflexions et son expérience, il a pu contribuer aux travaux menés dans des domaines tels que la biodiversité et les migrations. A mesure que l’OCDE accueillait de nouveaux membres, elle est devenue plus ouverte et plus sensible aux difficultés des pays en développement, et non pas uniquement à celles des pays développés, à des questions d’ordre sociétal, et non pas simplement économique.

C’est dans ce contexte que ses membres ont pris conscience de la nécessité de tisser des liens plus étroits avec d’autres pays du monde. Dans quelques mois, nous espérons que le Chili sera rejoint par trois autres nouveaux membres, à savoir l’Estonie, Israël et la Slovénie. Nous nous réjouissons également de la perspective d’accueillir par la suite la Fédération de Russie. En parallèle, l’organisation renforce ses liens avec d’autres grandes puissances économiques mondiales, telles que l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Indonésie. Au total, les 40 pays concernés représentent plus de 80% de l’économie mondiale.

Le Chili, qui affiche depuis vingt ans une croissance supérieure à 5% par an, est un phare pour l’Amérique latine. Grâce aux réformes menées au début des années 1980, il dispose d’un système de retraite privé qui a inspiré de nombreux autres pays dans le monde. Il a accompli des progrès impressionnants dans la lutte contre la pauvreté, même si des efforts supplémentaires doivent être déployés. Lorsque la crise a éclaté, les mesures fiscales prudentes qu’il avait prises, notamment la mise en réserve des recettes tirées de ses riches gisements de cuivre pour faire face à des difficultés éventuelles, lui ont procuré une marge de manœuvre pour engager un programme de relance soutenant la demande et l’emploi.

Depuis l’ouverture des discussions avec l’OCDE en mai 2007, le Chili a pris d’importantes dispositions en mettant un terme au secret bancaire qui protégeait dans certains cas des délinquants fiscaux et en donnant aux procureurs la possibilité de poursuivre les entreprises soupçonnées de corruption active ou passive. L’extension de la couverture des retraites publiques compte également parmi les grandes réformes mises en œuvre.

Le droit de la concurrence et la protection des consommateurs ont été renforcés. Une nouvelle loi a établi une nette séparation entre l’Etat et le conseil d’administration de la Société nationale du cuivre (Codelco), première entreprise publique du Chili. Dans le secteur privé, une nouvelle loi va accroître la transparence en imposant une meilleure communication d’informations aux marchés financiers tout en luttant contre les délits d’initiés et en renforçant les critères applicables aux auditeurs externes. Une nouvelle politique nationale sur la sécurité des substances chimiques fait partie des efforts entrepris pour respecter les normes de l’OCDE en matière de protection de l’environnement.

De telles mesures requièrent à la fois une grande détermination et une forte volonté politique, deux qualités dont le Chili a manifestement fait preuve. Mais l’aventure ne fait que commencer, pour ce pays comme pour l’OCDE. L’adhésion du Chili est la première étape d’un processus qui verra l’organisation étendre la portée de ses activités afin de gagner en pertinence et en efficacité. Notre objectif est d’améliorer le bien-être de tous les citoyens, non seulement dans nos pays membres mais à l’échelle internationale.

Angel Gurría, secrétaire général de l’OCDE.