Protégeons la population syrienne des armes explosives!

Bombardement de Kobané en octobre 2014. © Reuters / KAI PFAFFENBACH
Bombardement de Kobané en octobre 2014. © Reuters / KAI PFAFFENBACH

Alors que le conflit en Syrie entre dans sa sixième année, la souffrance quotidienne de la population a atteint une ampleur et une intensité inégalées. Le bilan est lourd avec plus de 250’000 morts et plus d’un million de blessés.

La situation est désespérée pour les 20 millions de survivants. Les dangers omniprésents des combats et des bombardements obligent les civils à fuir. 4,6 millions se sont déjà réfugiés dans les pays voisins, où bon nombre peine à trouver de quoi se nourrir et se loger.

A l’intérieur du pays, 13,5 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire. Parmi eux, 4,5 millions vivent dans des zones assiégées ou difficile d’accès et se retrouvent prisonniers des combats, manquant d’eau, de nourriture et de soins.

Bombes à sous-munitions massivement utilisées

Les armes explosives de guerre, y compris les bombes à sous-munitions et les mines antipersonnel interdites par des traités internationaux, sont utilisées massivement dans les zones peuplées. Elles ont des conséquences dévastatrices pour les civils, provoquant des souffrances, des blessures graves, des handicaps lourds et des traumatismes psychologiques profonds.

Elles détruisent aussi toutes les infrastructures: les habitations, écoles et hôpitaux sont rasés! Depuis le début de l’année, des attaques ont été perpétrées contre 13 centres de santé et des hôpitaux, au mépris du Droit international humanitaire.

Les dégâts dans les villes, à l’instar de Kobané, sont terribles. Les 700 frappes aériennes et les combats au sol ont détruit près de 80% de la ville. Le niveau impressionnant de destructions rappelle des images de la 2ème guerre mondiale. Handicap International y a recensé, en avril 2015, un niveau de contamination par les restes explosifs de guerre d’une extrême diversité et densité (10 munitions au mètre carré dans le centre-ville).

Un «marché» des projectiles non explosés restés au sol

Un pourcentage élevé de ces armes n’explose pas au moment de l’impact, constituant une menace mortelle et permanente pour les survivants longtemps après la fin des combats. Un véritable «marché d’explosifs» restés au sol, empêche le retour de la population chez elle.

Dans son rapport «Utilisation d’armes explosives en Syrie: un héritage mortel» (mai 2015), Handicap International alerte sur le niveau élevé de pollution par ces armes dans tout le pays. Plus de 5 millions de Syriens vivent dans des zones hautement contaminées, parmi eux plus de 2 millions d’enfants.

Dès sa création, l’organisation a fait de la lutte contre les armes explosives et ses conséquences son cheval de bataille. A Genève, la Broken Chair symbolise ce combat contre les violences infligées aux populations lors des conflits armés. Installé face aux Nations unies, le monument est un défi adressé à la communauté internationale. Il lui rappelle ses obligations de respecter le Droit international humanitaire et de protéger les civils contre l’usage des armes explosives en zones peuplées.

Des destructions qui doivent être qualifiées de crimes de guerre

Le carnage sans précédent de la population syrienne doit être fermement condamné. Et la destruction des habitations, écoles et centres médicaux doit être considérée comme un crime de guerre.

La communauté internationale doit agir d’urgence dans la lutte contre les restes explosifs de guerre. Les civils, et en particulier les enfants, doivent être protégés contre l’utilisation de ces armes.

Il est impératif de soutenir sans tarder la mise en place de programmes de dépollution des mines et autres résidus explosifs, et d’éducation aux risques. Sans oublier les projets d’assistance aux victimes, pour garantir notamment l’accès aux services de réhabilitation et leur qualité.

Handicap International a certes débuté des opérations de dépollution dans les zones les plus sensibles, notamment là où le déplacement de réfugiés est fréquent. Mais elles sont pour l’heure difficiles à mettre en place car les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour acheminer le matériel et opérer normalement. Au regard de la situation actuelle, des dizaines d’années seront nécessaires pour dépolluer le pays.

Petra Schroeter, directrice de Handicap International Suisse.

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