Sauver l’UNRWA pour sauver l’éducation en Palestine

Ecolières d'un établissement financé par l'UNRWA. Gaza City, 22 janvier 2018. © MAHMUD HAMS
Ecolières d'un établissement financé par l'UNRWA. Gaza City, 22 janvier 2018. © MAHMUD HAMS

La venue de Donald Trump au WEF de Davos «réjouit» le Conseil fédéral. Berne s’affaire pour organiser un entretien. Mais de quoi parler? A coup sûr, finances, fiscalité, économie. Très bien.

A part ces priorités bilatérales, le Conseil fédéral se doit d’exprimer à Trump sa vive inquiétude quant aux pressions financières exercées par les Etats-Unis sur l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). Un sujet important (hors EU-Suisse) pour Ignazio Cassis, le nouveau ministre des Affaires étrangères. Et deux thèmes décisifs – santé et éducation – qu’Alain Berset, président et ministre de la Santé et de la Culture, connaît bien.

Une histoire dramatique

L’UNRWA, c’est une histoire dramatique débutée en 1949 par une résolution de l’Assemblée générale de l’ONU qui a vu son mandat régulièrement renouvelé depuis. C’est une institution qui gère 5,9 millions de réfugiés palestiniens aujourd’hui dans tout le Moyen-Orient. Avec un budget annuel de 1,2 milliard de dollars, couvert par des contributions volontaires (dont la Suisse en 10e position, avec 25 millions de dollars et, en tête, les Etats-Unis avec 350 millions de dollars, inclus des projets humanitaires), l’UNRWA accomplit un travail remarquable: scolarisation de 525 000 élèves (dont la moitié de filles) dans 700 établissements, des projets de santé avec 9 millions de visites médicales par an, une aide sociale pour 250 000 personnes très pauvres vivant dans une soixantaine de camps souvent surpeuplés, insalubres. Et d’importants programmes humanitaires lors de situations d’urgence, comme en Syrie ou à Gaza.

C’est cet immense travail pédagogique de l’UNRWA (avec 22 000 instituteurs-trices) qui donne des perspectives à la jeunesse palestinienne pauvre, qui lui donne le bagage scolaire, mais aussi l’éducation aux valeurs de tolérance, de diversité, de liberté. Fondamental, dans un contexte de tensions politiques, d’occupation, d’islamisation. Donald Trump n’est peut-être pas un grand stratège, mais il comprend certainement les vertus d’un soutien à une éducation laïque, porteuse de paix et rempart de l’islamisme. En coupant dans le budget de l’UNRWA (les Etats-Unis viennent d’annoncer une contribution 2018 réduite à 60 millions de dollars), Trump fait pourtant exactement le contraire: il va encourager violence et désespoir et stimuler demain de nouveaux foyers terroristes. Tout cela pour punir le leadership palestinien d’avoir critiqué – comme le monde entier et la Suisse – sa récente position sur Jérusalem.

Directeur suisse

Le Conseil fédéral a un autre argument à faire valoir dans sa défense de l’UNRWA: son directeur actuel, Pierre Krähenbühl, est Suisse, un pro de l’humanitaire, un ancien du CICR, que Berne connaît bien. On ne peut pas voir mettre en danger «son» institution sans rien faire!

Tentez le coup face à Trump. Court, précis, concis: pas (encore) de plan de paix global pour le Moyen-Orient, mais contribuer au sauvetage d’une institution que nous connaissons bien, qui travaille à la paix. Au nom du droit à l’éducation, du droit à la santé. Au nom de la prévention du terrorisme: Trois objectifs déterminants que les Etats-Unis et la Suisse partagent. Il faut juste les promouvoir activement, aussi financièrement, surtout au Moyen-Orient qui brûle. Et ne pas couper le budget de ceux qui s’y emploient avec compétence et succès depuis des décennies.

Mario Carera, consultant.

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