Un budget pour l'avenir de l'Europe

Il y a une semaine, après une longue nuit de négociations, les 27 présidents et premiers ministres européens sont parvenus à un accord sur le budget de l'Union européenne pour les sept années à venir. Lundi 18 février, je présenterai et défendrai ce budget devant le Parlement européen.

Comme il apparaît clairement dans la presse, chaque dirigeant s'est efforcé d'obtenir le meilleur résultat pour son propre pays et ses citoyens. Ce qui est parfaitement légitime, tout comme le fait que certains aient principalement mis l'accent sur les préoccupations de leurs contribuables tandis que d'autres ont privilégié les attentes des bénéficiaires.

Ce qui importe à mes yeux, c'est que, ensemble, nous soyons parvenus à un accord sur un budget pour le reste de la décennie, et à un bon compromis pour l'Europe dans son ensemble.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Il s'agit d'un budget légèrement plus réduit que le précédent, mais où la part consacrée aux investissements de croissance et à l'emploi est en hausse. Ce résultat traduit les deux considérations essentielles qui ont motivé nos choix : l'Europe doit s'adapter aux contraintes budgétaires sévères qui s'imposent dans tous nos Etats, tout en poursuivant d'ambitieux investissements d'avenir.

Comme partout en Europe, la priorité consiste à faire plus avec moins d'argent (également en termes administratifs), et à faire en sorte que chaque euro soit dépensé là où il peut avoir le plus d'impact.

Actuellement, chacun se serre la ceinture et l'Union ne saurait faire exception ; la seule solution était donc un budget de modération. Pour la première fois, les plafonds de dépense ont été abaissés, et ils ne peuvent dépasser 1 % du revenu national brut de l'UE.

PRIORITÉ À L'EMPLOI, À LA CROISSANCE ET À LA COMPÉTITIVITÉ

Au vu des défis économiques actuels, la priorité absolue est à l'emploi, à la croissance et à la compétitivité. Il serait insensé de sacrifier des investissements d'avenir, dans l'éducation, la recherche ou l'innovation. C'est pourquoi le nouveau budget prévoit une augmentation de 37 % (soit 34 milliards d'euros) précisément dans ces domaines, tout en réservant des montants non négligeables pour les réseaux transfrontières d'énergie, de transport et numériques (30 milliards d'euros).

Des financements supplémentaires iront également à des initiatives-clés, telles que le programme d'échange "Erasmus pour tous", destiné aux étudiants et aux enseignants, ou "Horizon 2020", le plus important programme de recherche et d'innovation à l'échelle du continent.

C'est la modernisation du budget qui a permis cette orientation. Par exemple dans le domaine de l'agriculture, une politique gérée principalement au niveau européen, l'accent est mis non plus sur les subventions globales mais sur des mesures visant à garantir des revenus équitables aux agriculteurs, à favoriser la qualité de la vie dans les zones rurales ainsi que des pratiques plus "vertes".

Un secteur alimentaire durable est vital pour tout Européen. L'agriculture n'appartient pas au passé mais, grâce aux réformes introduites dans la politique agricole commune, son poids relatif dans le budget européen diminue et cette tendance se poursuivra.

Face à la montée du chômage des jeunes - fléau qui touche un jeune Européen sur quatre et, dans certains pays, un sur deux -, une nouvelle initiative de 6 milliards d'euros va être lancée pour remédier à cette situation dramatique.

Des fonds régionaux seront mobilisés pour venir en aide aux pays les plus durement frappés par la crise, tandis que les financements destinés à améliorer la cohésion sociale dans l'Union continueront d'être affectés en priorité aux régions les plus pauvres et aux personnes les plus défavorisées. Et, malgré la crise, les moyens permettant à l'Europe de s'engager pleinement sur des enjeux d'importance mondiale, tels que l'aide au développement ou le changement climatique, sont bel et bien préservés.

En somme, il s'agit donc à bien des égards d'un budget modernisé, réaliste, qui privilégie les besoins les plus urgents. Un budget imparfait sans doute, comme tout compromis, mais qui permet de concilier les points de vue.

Certains regrettent que les propositions en matière d'investissements n'aient pu être toutes reprises dans leur intégralité ; le coût en aurait été trop élevé. Je peux le déplorer à titre personnel, mais il serait trompeur de présenter des ajustements à un projet initial comme des "coupes budgétaires" alors que, en réalité, le budget que nous avons arrêté prévoit des montants considérablement plus élevés pour les investissements en faveur de la croissance que le budget actuel. Et ce sont ces montants qui feront la différence.

DES PRÉOCCUPATIONS LÉGITIMES

L'accord conclu vendredi 8 février ne marque pas un point final. Le Parlement européen doit maintenant examiner l'accord politique intervenu au niveau des dirigeants dans la perspective d'une ultime négociation. Ses membres ont déjà exprimé des préoccupations légitimes, par exemple concernant la mise en place de nouvelles sources de recettes ou de formes de flexibilité budgétaire.

C'est parfaitement raisonnable, puisque personne ne peut prédire dans quel monde nous évoluerons dans sept ans. Par ailleurs, cette flexibilité facilitera la couverture en paiements effectifs des engagements de l'Union.

Un budget d'investissement tel que le nôtre, établi pour sept ans, constitue un puissant facteur de prévisibilité. A défaut, nous ne pourrions engager des fonds que pour une seule année. Pour les scientifiques, les associations caritatives et les universités, pour les collectivités locales et régionales de toute l'Europe, cela représenterait un contrecoup majeur. De grands projets en sont tributaires.

A l'heure où justement la confiance dans nos économies revient progressivement, ce sera un signe positif que de sceller cette perspective septennale pour l'Europe.

Herman Van Rompuy, président du Conseil européen

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