Violence terroriste et vivre-ensemble

Des aspirants policiers montrent au public divers moyens de contrainte et interventions lors de la journée officielle du 11e anniversaire de l’Académie de police à Savatan, ce jeudi 9 juillet 2015. © ANTHONY ANEX / KEYSTONE
Des aspirants policiers montrent au public divers moyens de contrainte et interventions lors de la journée officielle du 11e anniversaire de l’Académie de police à Savatan, ce jeudi 9 juillet 2015. © ANTHONY ANEX / KEYSTONE

Aborder la résilience, c’est définir une posture nous permettant d’anticiper les risques et les crises à venir et de s’y préparer. Mais c’est aussi la volonté ferme de les affronter, de les résoudre et de garantir la défense de nos valeurs communes.

Cette capacité et cette volonté sont le fruit d’une stratégie guidée par un souci d’humanité et de pragmatisme, de rigueur et d’efficacité aussi. Elle suppose des impératifs:

– l’anticipation: nulle épreuve ne peut être dépassée si les esprits, les cœurs et les corps ne sont pas préparés, entraînés.
– l’engagement de tous les rouages de la société. L’Etat ne peut pas tout. La mobilisation de l’ensemble des acteurs est indispensable à la résilience générale.
– l’adaptation aux nouvelles exigences de sécurité des Corps constitués en charge de défense et de sécurité. Ils détiennent la force, le monopole de la violence légitime et peuvent ainsi s’opposer aux agressions les plus directes sur les personnes et les biens.

Vulnérabilité face aux événements

Parler de résilience, c’est prendre en compte les inquiétudes et les attentes légitimes des citoyennes et citoyens face à la survenance de la violence. Aujourd’hui, nos sociétés occidentales s’interrogent sur leur sécurité; les opinions publiques sont brusquement choquées par des crises à répétition; elles se découvrent vulnérables face à des événements tragiques.

Les réactions sont émotionnelles, l’instantané médiatique prédomine: nous avons donc à réfléchir et à agir sur notre mode de sécurité. Dans cet environnement, la résilience du citoyen consiste, notamment, à prendre une responsabilité majeure: promouvoir l’équilibre et le respect du vivre ensemble.

Lutte longue et difficile

La violence induite par le terrorisme n’épargne plus personne. Notre sécurité doit donc être adaptée à cette nouvelle réalité: avec les forces de l’ordre et leurs modes opératoires d’une part, en relevant d’autre part un défi sociétal majeur, visant un ordre naturel basé sur la liberté, la vérité, la justice et la solidarité.

Les récents attentats annoncent une lutte longue et difficile. La menace actuelle est partout, diffuse, imprévisible, souvent même là où on ne l’attend pas: dans une rue paisible, sur une terrasse de restaurant, dans un théâtre… L’adversaire est à même d’agir au cœur de nos cités. Et il peut y transporter la violence d’affrontements bien éloignés de nos frontières. La sécurité n’est jamais définitivement acquise, elle se construit, se renforce au quotidien.

Le chaos technique à portée de tous

Autre facette de la menace relayée par le terrorisme: celle qui, moins spectaculaire mais plus redoutable, consiste à exploiter non seulement la vulnérabilité et la peur des populations et de leurs consciences mais aussi celle de leurs organisations.

Nos sociétés engendrent d’elles-mêmes pareille vulnérabilité: elles comptent excessivement sur les moyens techniques plutôt que sur les hommes pour assurer leur sécurité! En voulant démocratiser la technologie, elles ont mis le chaos technique à portée de tous: la porte est ouverte à la cybercriminalité, au cyberterrorisme. La réponse sécuritaire doit donc s’appuyer sur une logique de réseaux, de savoirs et de connaissances mais aussi sur la résilience de la société.

Forces de sécurité, formations et actions

La sécurité d’aujourd’hui exige une approche centrée sur l’homme et la femme: policier-gendarme ou soldat doivent être recrutés et formés afin d’être capables de faire face, avec discernement, en tout temps, à la menace. Et face à la menace terroriste, à être engagés selon les principes des «primos engagés» et des «primos intervenants». Sans oublier d’incarner un esprit de résilience au travers d’une posture et d’un rayonnement perceptibles par la population.

La culture policière doit désormais être orientée sur les valeurs qui fondent les Corps constitués. C’est dans cet esprit que l’Académie de police de Savatan forme les aspirants vaudois, genevois et valaisans. Avant de mobiliser les moyens, il faut chercher à mobiliser les esprits et les cœurs, habités de sentiments comme le sens aigu du devoir, une haute idée de sa mission ou encore une volonté de servir.

La sécurité n’est pas monnayable, mais elle a un prix. Le maintien d’un outil crédible passe par un effort budgétaire constant: une politique de sécurité sans moyens n’est qu’apparences! En matière de sécurité, la tragique réalité de notre humanité ne laisse aucune place, ni à l’utopisme ni aux discours complaisants.

Alain Bergonzoli, colonel de gendarmerie, directeur de l’Académie de police de Savatan.

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