Les candidats aux élections européennes doivent s’engager à renforcer le soutien apporté par l’Europe à l’aide alimentaire

« Sortir 15 millions de personnes en Europe de la pauvreté d’ici à 2030 », c’est l’engagement que prenait en 2021, la Commission européenne à l’occasion de l’adoption du socle européen des droits sociaux. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Force est de constater que cet objectif, loin d’être atteint, s’éloigne.

Les crises se sont depuis télescopées – des conséquences de l’épidémie de 2020 à la guerre en Ukraine et au choc inflationniste –, avec un point commun : celui de frapper plus fortement les plus précaires et les plus pauvres, qui ont vu leur accès à l’alimentation se réduire, engendrant une hausse du recours à l’aide alimentaire en France et partout en Europe.

Les différentes banques alimentaires en Europe accompagnent aujourd’hui 12,4 millions de personnes, avec un constat commun de l’arrivée des travailleurs pauvres à l’aide alimentaire, traduisant en cela une fragilisation des classes moyennes sur notre continent. En France, les Restos du cœur sont passés en un an de 142 à 171 millions de repas, distribués à 1,3 million de personnes, soit 200 000 personnes supplémentaires. Les banques alimentaires accompagnent 800 000 personnes de plus qu’en 2008 avant la crise financière, soit 2,4 millions aujourd’hui.

L’Europe doit lutter pour prévenir le basculement dans la pauvreté, mais elle doit aussi soutenir les acteurs de la solidarité, avec plusieurs enjeux : faire face à l’augmentation des besoins, aller vers une aide alimentaire plus durable, et accompagner socialement les personnes accueillies.

Le débat pour le budget de l’Union européenne 2027-2033 sera lancé dès 2025, et sera élaboré au cours de la prochaine mandature. Dès à présent, les candidats aux élections européennes du 9 juin doivent s’engager à maintenir et à renforcer le soutien apporté par l’Europe à l’aide alimentaire dans le prochain budget. Aujourd’hui, ce soutien représente plus d’un repas sur quatre distribués par les Restos et 20 % des approvisionnements des banques alimentaires, mais, en termes budgétaires, il reste modeste : moins d’un euro par Européen et par an !

L’accompagnement mis en œuvre par des centaines de milliers de bénévoles engagés n’est d’ailleurs pas qu’une aide d’urgence. Il est une porte d’entrée vers l’inclusion sociale et un point de contact qui permet aux personnes de reprendre pied et de s’en sortir durablement : accès aux droits, aide au budget, soutien à la recherche à l’emploi, alimentation, prévention santé, etc.

Pour nous permettre de faire face aux besoins et d’améliorer encore plus la qualité et la diversité des produits que nous redistribuons, iI est essentiel de soutenir les associations dans leurs achats. Contrairement aux entreprises qui peuvent déduire et récupérer la TVA sur leurs achats professionnels, les associations y sont soumises. La mise en place d’une TVA à 0 % serait une mesure simple et immédiatement efficace, mais qui nécessite une évolution de la réglementation européenne en la matière.

Une TVA à 0 % est un investissement social que les associations savent démultiplier en action concrète sur le terrain, au profit des personnes en difficulté. Afin de faciliter le choix de fournisseurs locaux et de produits de qualité dans le cadre des appels d’offres, nous pensons également qu’il faut remettre à plat les règles européennes en matière de commande publique.

Une telle évolution permettrait non seulement aux collectivités de favoriser le tissu local dans le cadre de leurs politiques de restauration collective, mais aussi aux acteurs de l’aide alimentaire de renforcer leurs liens avec les filières alimentaires locales et de qualité, y compris dans le cadre des marchés publics du Soutien européen à l’aide alimentaire. Ce sont des achats qui bénéficieront directement au monde agricole, très en difficulté.

Au regard de l’enjeu de l’accès à une alimentation de qualité pour tous, nous appelons les candidats à s’engager autour de ces trois propositions et à les porter au Parlement européen, pour renforcer le rôle de l’Europe dans la lutte contre la précarité et en faveur de l’accès à l’alimentation de tous. Une traduction concrète de ce que peut être et doit être la solidarité européenne.

Jean Cottave (Président bénévole des banques alimentaires) et Patrice Douret (Président bénévole des Restos du cœur)

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